Une « icône », un « papa », un « fédérateur »: des milliers de membres de la diaspora congolaise, venus de toute l’Europe, ont rendu dimanche à Bruxelles un dernier hommage à Etienne Tshisekedi, l’opposant historique décédé quatre jours plus tôt dans la capitale belge.
Pour cette troisième et dernière journée de veillée funéraire, le cercueil du défunt a été exposé pendant plusieurs heures dans une vaste salle mise à disposition de la famille Tshisekedi par la ville de Bruxelles, à proximité du célèbre site de l’Atomium, dans le nord de la capitale.
Les visiteurs ont fait la queue, patientant parfois pendant des heures, avant de pouvoir s’incliner sur le cercueil surélevé, entouré de couronnes de fleurs et de portraits du défunt, le montrant coiffé de son éternelle casquette.
Chants religieux et partisans se sont succédés dans une atmosphère parfois festive, malgré les nombreux yeux mouillés de visiteurs de tous âges, originaires de toute la Belgique, mais aussi de France, du Royaume-Uni ou encore d’Allemagne.
« C’est notre icône », témoigne Armand Moke, venu de la région de Dortmund en Allemagne, à plus de 200 kilomètres: « C’est un monsieur qui a combattu pendant une trentaine d’années pour instaurer la démocratie pour notre pays ».
« On a perdu vraiment un papa », répète Pélagie, 50 ans, qui a fait le déplacement depuis Anvers (nord de la Belgique), où elle vit depuis dix ans. « C’est un héros, ce qu’il a fait au Congo, personne ne peut le faire », souligne-t-elle, sans cacher son inquiétude: « Qui va le remplacer? »
« On a investi beaucoup d’espoir dans le dialogue » engagé en RDC pour une transition politique, dans lequel Etienne Tshisekedi jouait un rôle-clé, « on se disait qu’on était presque au bout du tunnel », explique Jean-Pierre Mukendi, originaire lui aussi du Congo, et prêtre dans une paroisse du Brabant Wallon (centre)depuis 17 ans.
– Garder l’espoir –
Les Congolais perdent « un fédérateur, un rassembleur », dit-il pour expliquer l’inquiétude des partisans du défunt. « Nous traversons un moment d’incertitudes, mais nous gardons espoir », assure-t-il cependant.
Dans la grande salle de la veillée, un orateur prend le micro: « Il est mort mais son esprit reste parmi nous. Nous perpétuerons son héritage », lance-t-il, avant de faire acclamer la veuve de « Tshishi », présente au côté de son fils Félix.
Etienne Tshisekedi s’est éteint mercredi dans une clinique de Bruxelles après avoir quitté huit jours plus tôt pour des soins la RDC, où il participait aux négociations sur la mise en place d’une transition politique après la crise provoquée par le maintien au pouvoir de Joseph Kabila.
Le mandat de M. Kabila est échu depuis le 20 décembre 2016, mais le chef de l’État reste à son poste en attendant la tenue d’une élection permettant de désigner son successeur.
Tshisekedi était entré en dissidence en 1979-1980 en dénonçant l’arbitraire du régime du dictateur Mobutu Sese Seko, après avoir accompagné son ascension à l’indépendance du Congo belge, en 1960.
Il a ensuite incarné l’opposition au tombeur du « Léopard », Laurent-Désiré Kabila, arrivé au pouvoir par les armes en 1997, puis à son fils Joseph Kabila, qui lui succèdera après son assassinat en 2001.
Battu en novembre 2011 à l’issue d’un scrutin entaché d’irrégularités massives, Tshisekedi aura refusé jusqu’au bout de reconnaître la légitimité de M. Kabila.
Les autorités congolaises ont annoncé vouloir organiser des « funérailles dignes d’un ancien Premier ministre » pour l’éternel opposant, dont la date du transfert de la dépouille en RDC n’est pas encore connue.