Invité de l’émission TOP PRESSE sur TOP CONGO FM, le nouvel ambassadeur extraordinaire et plénipontentiaire, chef de la délégation européenne en RDC, qui reconnait n’avoir pas encore maitrisé les langues du pays, évoquant le proverbe « Musapi moko ebomaka sili te » pour dire qu’un seul doigt ne peut écraser un poux, dit être convaincu que « nous devons ensemble faire un travail d’équipe, renforcer nos capacités et valoriser nos potentialités ».
« Je voudrai que mon mandat puisse contribuer à faire évoluer un partenariat win-win entre la RDC et l’UE », insiste-t-il.
S’agissant des critiques reprochant à l’UE de ne pas développer des projets concrets, à l’instar des chinois et autres partenaires au développement en RDC, Jean-Marc Châtaignier « pense à la Route nationale, au balisage fluvial, au secteur de la santé, à la conservation des milieux naturels et autres ».
En ce qui concerne la gratuité de l’éducation de base, l’ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de l’UE estime que « les discussions vont être menées sur son apport avec le gouvernement ».
Le volume de l’aide au développement
Evoquant le 11ème fonds européen, Jean-Marc Châtaignier affirme que « nous parlons d’un nouveau cycle car il y a eu un 10ème fonds européen ».
« On va discuter en 2020 des nouveaux axes de coopération après les accords de Cotonou. Mais pour la période précédente, ce que nous avons entrepris en RDC par rapport aux projets et programmes ont été des axes prioritaires définis dans la Convention de Cotonou ».
L’ambassadeur fait remarquer que « même avec 1 milliard de dollars américains, on ne peut pas répondre à tous les besoins de développement de la RDC ».
« On peut juste appuyer des projets ou des experimentations là où on peut faire la différence. On ne répondra jamais, pas plus que l’ensemble des bailleurs de fonds d’ailleurs, à tous les besoins du pays », insiste-t-il.
La solution, estime le chef de la délégation européenne en RDC, « il faut que le pays repose sur ses propres ressources, avoir un meilleur contrôle de ses ressources fiscales ».
« L’Union européenne ne peut pas venir en donneuse des leçons ni faire le travail de bonne gouvernance à la place du gouvernement congolais. Notre rôle est juste d’appuyer là où nous pouvons faire la différence », a-t-il martelé.
Abordant la question de l’ingérence,
« Cette ingérence n’a pas lieu d’être. Nous sommes dans un partenariat qui nous permet à tous d’avoir à dire. Nous avons en commun les mêmes valeurs (Convention de Cotonou). La RDC, en signant cette Convention, s’est engagée par rapport à la réalisation de ces principes que nous avons en commun. Cela n’est pas une ingérence mais un processus de dialogue où chaque partie engagée doit respecter ces principes (droits individuels et collectifs, etc?) », affirme Jean-Marc Châtaignier.
« Le partenariat RDC-UE est gagnant-gagnant », soutient-il en prevenant que « sans secteur privé, sans PME congolaises, il n’y aura jamais de développement en RDC. Nous devons travailler ensemble pour améliorer les indicateurs dans le secteur du climat des affaires. Il y a des choses que nous devons tous faire pour faciliter la gouvernance privée et publique en RDC », souligne l’ambassadeur.
Coopération RDC-Chine, résultats palpables
« Là, vous êtes sévères par rapport aux réalisations de l’UE en RDC. La coopération chinoise est-elle win-win? Je pense que les conditions de l’UE ne sont pas du tout fermées, elles sont transparentes. Il y a une ouverture et cela n’existe pas chez tous les autres partenaires. En ce qui concerne les conditions de prêts des chinois, je pense que la RDC doit les examiner de près. Cela n’est pas mon rôle. En tant que partenaire du Congo, je pense que le gouvernement doit voir cela de près », rétorque Jean-Marc Châtaignier.
Il y a, poursuit-il, « un certain nombre des résultats à impact visible et qui sont appréciés par les partenaires que nous aidons. Aujourd’hui, on peut prendre la RN et payer pratiquement une centaine de dollars alors qu’avant, il fallait prendre un avion. J’ai visité un projet au Plateau de Bateke et là, j’ai vu un appui de l’UE en faveur des agricultureus. Ces derniers sont heureux et il y a même un qui m’a offert un coq. C’est signe qu’ils sont épanouïs », se réjouit l’ambassadeur.
Qui précise que « depuis le début de l’année, le Président Tshisekedi fait un travail extraordinaire pour faire la promotion de la RDC au près de ses partenaires, à travers tous les voyages qu’il effectue. Nous, l’UE, nous ne pouvons qu’accompagner ce processus d’ouverture en attenuant les conditions des prêts (fonds de garantie, etc.). Nous sommes en train de travailler avec la Banque européenne d’investissement (BEI) afin qu’elle développe ses activités ici au Congo mais nous sommes aussi en train de travailler pour faire venir d’autres banques européennes (publiques ou privées) en RDC », souligne-t-il.
La bonne gouvernance: un impératif à l’aide au développement?
En ce qui concerne la bonne gouvernance, explique Jean-Marc Châtaignier, « l’UE soutient qu’il faut respecter nos citoyens. Cela concerne tout le monde. Il me semble que nous pouvons travailler ensemble et cela ne date pas d’aujourd’hui. Par exemple, dans le secteur de la justice, l’UE a soutenu les efforts dans le cadre la lutte contre l’impunité », a-t-il rappelé.
« On peut toujours critiquer en disant que tout cela n’est pas assez mais moi je crois que le souhait du gouvernement est de veiller à l’État de droit et là, nous sommes engagés et prêts à soutenir le gouvernement congolais », promet-il.
Jean-Marc Châtaignier entend dire « des entrepreneurs congolais et autres qu’il faut améliorer le climat des affaires. Ce que les investisseurs n’aiment pas trop, ce sont les changements constants des mécanismes fiscaux, qu’on leur exigent des subventions. La délivrance des visas pour les investisseurs est trop compliquée en RDC. Il y a des mesures très simples qui peuvent être mises en application pour faciliter la vie aux investisseurs congolais et étrangers », insiste-t-il.
Une fois de plus, faisant allusion au séjour du Président de la République en Belgique, l’ambassadeur relève le fait que c’est « compliqué pour les investisseurs européens et autres de venir dans un pays classé au 183ème rang du classement Doing business. Il y a besoin d’envoyer des signaux, de la part du gouvernement congolais et le Président Tshisekedi l’avait dit, pour pouvoir convaincre cette communauté à accepter de venir au Congo », a-t-il fait savoir.
S’agissant du volume de la coopération, le chef de la délégation européenne en RDC dit être « convaincu que l’enveloppe à venir sera significative ».
Conflit politique UE-RDC, sanctions…
« Ce ne sont pas des sanctions mais des mesures individuelles. L’UE n’a jamais arrêté ses programmes de coopération avec la RDC. Ce sont des mesures très limitées contre 14 personnes parce qu’elles avaient commis des violations des droits très documentés, soit parce qu’elles faisaient une obstruction au processus électoral », explique Jean-Marc Châtaignier qui affirme que « ce sont des mesures justes, souveraines et beaucoup des gens se sont d’ailleurs rendues comptes qu’elles ne devaient pas aller loin ».
Une fois de plus, estime-t-il, « ce sont des mesures qui ne sont pas extraterritoriales, limitées et strictement appliquées sur l’espace ou territoire européen. De même que la RDC peut décider pour des raisons X ou Y, de manière souveraine, contre certains ressortissants européens sur son territoire », précise-t-il.
Pour Jean-Marc Châtaignier, « ces mesures garantissent même la possibilité pour les personnes ciblées de se défendre » même si elles « sont des faits documentés et approuvés par les 28 États de l’UE ».
Levée des mesures?
« Ces mesures individuelles sont aussi revues chaque année par les États de l’UE. Nous sommes d’ailleurs en train de revoir cette liste et peut-être qu’elle sera revue et confirmée au mois de décembre », annonce l’ambassadeur qui précise qu’elles « ne sont pas des mesures de justice mais celles des nations souveraines ».
« Il y a des discussions pour décider de la suite qu’il faut donner à ces mesures. Il sera forcément tenu compte d’un certain nombre d’éléments par rapport à ce qu’on a connu depuis le début de cette année », pense-t-il avant de trancher que « ce sont mes chefs qui décident à Bruxelles et que je ne sais pas vous dire qui sera écarté de cette liste des mesures ».