Alors que Kinshasa réclame le départ des Casques bleus déployés en RD Congo, l’ONU a plaidé et obtenu leur retrait progressif durant un nouveau mandat d’une année, arguant que la situation sécuritaire est encore instable. Quel avenir pour la Monusco ? Quel bilan dressé de son action en RD Congo ? Ce sont là des questions que d’aucuns se posent. Et ce, à juste titre. Car, il est tout à fait obscur que plus de 20 000 casques bleus déployés en RDC n’aient pas réussi à éponger des petites bandes de rebelles qui écument certaines zones de l’est depuis plus de dix ans. Des bandes armées qu’ils côtoient jours et nuits. Des bandits armés qui malmènent, violent, extorquent, tuent…, souvent au su et au vu des Casques bleus, considérés pourtant comme des anges gardiens de la paix. Pire encore, ces Casques bleus ont versé dans le trafic des minerais et le viol…
Faut-il continuer à faire confiance en ces anges gardiens de la paix qui se comportent en véritables touristes ? C’est aussi là la question que les Congolais se posent.
Hier jeudi 26 mars, à New York. Le Conseil de sécurité de l’ONU s’est réuni pour adopter une résolution prolongeant le mandat de la Monusco, pour un an supplémentaire. Certains aspects de ce mandat deviennent de plus en plus difficiles à respecter, tant les relations entre la mission et Kinshasa sont devenues tendues depuis peu. Comme l’on peut le remarquer, le mandat de la Monusco a fait l’objet de vives discussions ces dernières semaines, avec notamment la demande de Kinshasa de réduire le nombre de casques bleus. Car pour le gouvernement, la situation sécuritaire s’est améliorée. Mais pour les partenaires de Kinshasa, la sécurité reste très fragile dans l’Est, arguant que les massacres dans la région de Béni en novembre dernier, mais aussi les attaques régulières de multiples groupes armés dans le Nord et le Sud-Kivu ou la Province Orientale ou encore le Katanga sont la preuve pour les Nations-unies que les casques bleus ne peuvent pas se retirer trop vite.
Un des points du mandat, qui était présenté il y a deux ans comme l’un des éléments de renforcement du mandat de la mission onusienne pose notamment problème. La brigade d’intervention de la Monusco devait pouvoir opérer seule contre les groupes armés, sous-entendu sans l’autorisation du gouvernement congolais. Mais voilà, deux ans plus tard, cette disposition de la résolution est restée lettre morte. « Kinshasa s’y oppose au nom de sa souveraineté », a expliqué un diplomate à New York, ajoutant que les membres du Conseil de sécurité insistaient, eux aussi, sur des opérations conjointes.
Réforme du secteur de la sécurité
A tout prendre, une évidence s’impose. Pas plus d’avancées sur l’appui à la réforme du secteur de la sécurité. Quand la Monusco n’était encore que la Monuc, c’était déjà censé être l’une des attributions clefs de la mission onusienne, et une condition de son retrait un jour. Le principe est simple, aider la RDC à avoir une armée bien formée, bien entraînée avec un code de conduite respectueux des droits de l’homme. Un pré-requis pour permettre un jour le départ des Casques bleus de la RD Congo. En 2013, le Conseil de sécurité avait ainsi proposé la création d’une force de réaction rapide : 4 à 6 bataillons qui puissent être déployés très vite. Mais deux ans plus tard, toujours rien !
La Monusco dit avoir rassemblé une dizaine de bailleurs et présenté un plan aux autorités. Mais ce plan a été rejeté en janvier. Pour Kinshasa, c’est une question de souveraineté nationale. La Monusco n’a donc pas à se mêler des questions de défense. Les Etats membres du Conseil de sécurité, quant aux, préfèrent mener des actions bilatérales que d’entrer en conflit ouvert avec le gouvernement congolais pour soutenir la Monusco dans son mandat. Les uns organisent des formations de bataillon, les autres d’officiers, etc. Selon des diplomates, c’est un peu un puzzle, en indiquant qu’il manque une vision d’ensemble ou une stratégie. Une absence de plan global qui fait que les investissements, dans ce secteur crucial, restent très limités également.
Sortir du blocage politique
Il y a un autre point du mandat qui n’est plus respecté non plus : la Monusco et ses « bons offices ». À savoir l’idée qu’elle devrait servir de médiateur neutre entre les acteurs politiques congolais et surtout à l’approche des élections. Le président Joseph Kabila s’est prononcé il y a plus d’un an déjà contre ce qu’il qualifie d’ingérence de la mission onusienne, un coup de reproche qui n’avait provoqué aucune réaction publique de la communauté internationale.
Comment sortir de ce blocage politique en 2015 alors que Kinshasa veut à tout prix réduire la présence des Casques bleus ? C’est la grande question qui a été débattue hier à New York.
Il sied de noter que depuis le mois de janvier dernier, la Monusco tente désespérément de rétablir un dialogue avec les autorités de Kinshasa. Des discussions officielles ont finalement repris mercredi dernier avec le ministre des Affaires étrangères Raymond Tshibanda, deux jours après la date initialement prévue.