Le président Kabila veut plaider sa cause auprès du pape François

Joseph Kabila

Le président de la République démocratique du Congo, Joseph Kabila, passera par Rome, et plus particulièrement par le Vatican, en se rendant à New York pour l’ouverture de la 71e Assemblée générale des Nations unies. Objectif : une audience avec le pape François pour tenter d’apaiser une situation de plus en plus tendue entre le pouvoir en RDC et le Vatican.

Depuis un mois et le dernier massacre de civils, le 13 août à Béni, dans l’est du Congo, le nonce apostolique Monseigneur Luis Mariano Montemayor a multiplié les critiques ouvertes sur la gestion du pouvoir en place en RDC. Non seulement pour les massacres à répétition dans l’est du pays mais également pour la gestion du dialogue national qui doit permettre l’organisation d’élections crédibles et apaisée dans ce pays.

En se rendant à Béni, le nonce apostolique argentin, arrivé en RDC en juin 2015, considéré comme très proche du pape, n’a pas mâché ses mots pour fustiger l’inaction du pouvoir en place en RDC face aux massacres à répétition dans l’est. Le « premier responsable de la sécurité, c’est le gouvernement. Aucun doute la-dessus » avait asséné le nonce qui avait par ailleurs appelé la Monusco (mission des nations unies en RDC) à « faire plus pour protéger les civils ». Dans la foulée, il avait aussi prévenu : « le Vatican va envoyer une délégation à New York pour interpeller le conseil de sécurirté qui dort un peu »

Ce week-end encore, le nonce, venu au Vatican pour faire rapport au pape, a réitéré ses critiques et relancé l’idée d’une enquête de la cour pénale internationale pour les crimes commis dans l’est de la République démocratique du Congo. Le 9 septembre, le nonce avait encore rappelé les propos du pape François qui a parlé du « silence honteux » qui entourait ces massacres dans l’est de la RDC.

Le Vatican, toujours par la voix du nonce apostolique, n’a pas manqué de critiquer aussi le dialogue national qui se tient actuellement à Kinshasa. Pour Monseigneur Montemayor qui, comme la plupart des diplomates étrangers influents à Kinshasa, na pas ménagé sa peine pour tenter de ramener un maximum de partcipants autour de la table des négociations, la majorité présidentielle n’a pas posé assez de gestes d’ouverture en direction de l’opposition et de la société civile. Il a donc constaté que ce dialogue « n’est pas représentatif parce que Tshisekedi et Katumbi ne sont pas autour de la table », comme il l’a déclaré sur les ondes congolaises. Un dialogue qui, jour après jour, voit ses participants déserter la table des négociations. Ce lundi, c’est toute la composante opposition, emmenée par Vital Kamerhe, qui a claqué la porte. « Une simple tactique pour mieux revenir et se montrer plus gourmand », à en croire certains observateurs qui soulignent tous que le contenu de ce dialogue est déjà « boutiqué depuis plusieurs jours ». « Une vraie gifle pour le pouvoir trop orgueilleux », selon des proches des représentants de la mouvance qui a « claqué la porte parce que le dialogue n’était en fait qu’un monologue kabiliste ».

Eviter le coup de bâton new-yorkais

Dans ce climat de tension, le président Kabila qui sait qu’il sera sur la selette à New York, d’autant que les prochains jours s’annoncent particulièrement chahutés en RDC (les opposants et la société civile annoncent de nombreuses opérations pour rappeler que le corps électoral doit être convoqué le 19 septembre pour l’élection présidentielle), va tenter de convaincre le pape qu’il est le meilleur garant de la paix dans son pays dans le contexte actuel. Une marche forcée pour aller coûte que coûte aux élections dans un pays comme le sien risquerait, selon les tenants de sa ligne, de provoquer un chaos sans commune mesure avec la situation actuelle. Une vesrion congolaise de « après moi le déluge », s’amuse un opposant.

Joseph Kabila veut aussi éviter que le Vatican alimente la critque à son sujet. La communauté internationale voit d’un très mauvais œil sa volonté de se maintenir au pouvoir et les Etats-Unis ont déjà évoqué à plusieurs reprises la menace des sanctions économiques contre les principaux cadres du régime.

La démarche du pouvoir congolais peut-elle aboutir ? La conférence épiscopale congolaise (Cenco) a toujours insisté sur sa mission de bons offices auprès de tous les acteurs de la crise congolaise, mais a surtout toujours répété qu’elle demande « le respect strict de la Constitution, notamment dans ses articles verrouillés comme l’alternance politique et la durée du mandat du président ». Dans ce contexte, la mission du président congolais semble donc relever de l’impossible.

Hubert Leclercq