Ce n’est pas le temps passé dans l’eau qui transforme un morceau de bois en crocodile. Paul Beveraggi vient de l’apprendre à ses dépens, lui qui avait misé sur les relations tissées avec l’ancien régime pour faire main basse sur une entreprise minière congolaise, à savoir Mck mining. L’homme d’affaires véreux d’origine corse ne s’imaginait pas qu’un jour la Rd-Congo pouvait devenir un Etat de droit où la justice jouerait un rôle prépondérant dans la lutte contre la corruption, l’impunité et autres antivaleurs. Son esprit obtus l’avait poussé à penser qu’il n’y aurait pas une différence de gouvernance entre Joseph Kabila et Félix Antoine Tshisekedi.
Or, c’est à la faveur de l’avènement du nouveau président de la république que la restauration d’un Etat de droit devient une réalité en Rd-Congo. Cela en sifflant la fin de règne pour les intouchables,
ceux-là mêmes qui se croyaient être au-dessus de la loi. En effet, après une saga judiciaire de plus de cinq ans, un dossier pendant en justice vient de connaitre son aboutissement. Il s’agit de l’acceptation par la justice congolaise d’exécuter l’arrêt de la Cour de cassation de Paris du 5 février 2020 qui mettait définitivement un terme au conflit qui opposait Moise Katumbi à Paul Beveraggi au sujet de l’entreprise Mck mining qui a subi diverses dénominations au gré du courtier corse ayant abusé de la bonne foi
de toutes les parties impliquées.
Malheureusement pour l’habile manipulateur qui avait dans sa poche quelques généraux de lui ayant servi de boucliers face au fisc congolais, l’on ne pouvait pas à tous les coups et en tout temps.
Demandons à nos lecteurs de lire l’article pour se faire une idée du fond de l’affaire dont le dénouement heureux vient d’avoir lieu après une bataille acharnée contre les forces du mal.
Fin de course pour Pascal Beveraggi et NB MINING
24 September 2020
Il y a un juge qui s’appelle le temps et qui met tout le monde à sa place, dit-on ! Depuis l’arrêt de la Cour
de Cassation de Paris du 20 février 2020 qui a confirmé la décision de la Cour d’Appel de Paris annulant la cession de 85% des actions de NECOTRANS MINING à Pascal Beveraggi, le Corse n’en mène plus
large. L’aventure congolaise de l’homme d’affaire français arrive lentement et sûrement à son terme. La
décision du tribunal de Kolwezi qui abonde dans le sens de la Cour de Cassation de Paris et de l’arrêt du 25 mars 2020 de la Cour de Cassation congolaise met un terme à un véritable marathon judiciaire. Confronté à la réalité à laquelle il a toujours voulu échapper, l’homme d’affaires français se retrouve dans les cordes.
Un petit rappel de la saga du Corse en RD Congo dévoile un monde où le trafic d’influence et la corruption rivalisent avec le banditisme et le voyoutisme. En 2015, sur recommandation de la haute direction du groupe NECOTRANS, c’est en qualité de Directeur des Relations publiques que Pascal Beveraggi pour gérer les relations publiques de la nouvelle acquisition du deuxième groupe français spécialisé dans la logistique portuaire et pétrolière. Dans son expatriation au Katanga, ce fils d’un
homme d’affaires corse réputé trouvait l’occasion rêvée de prendre le large afin d’échapper aux rigueurs du fisc français. Plus connu pour ses voitures de luxe et son goût pour la dolce vita que sa réussite dans les affaires et la finance, Pascal Beveraggi avait été condamné par la justice française à payer 297.477 euros pour différentes charges, notamment importation sans déclaration d’un navire de plaisance, détournement de destination privilégiée des produits pétroliers et défaut de déclaration du droit de passeport du navire qui naviguait illégalement sous pavillon caïmanien. En bref, l’homme d’affaires avait tout simplement voulu éluder la TVA en prétendant louer son bateau à des clients saisonniers. En novembre 2016, lorsque l’huissier de justice frappait à la porte de Pascal Beveraggi, il trouvait
porte close. Celui qui prétend aujourd’hui avoir déboursé des millions de dollars pour acquérir la société
dans laquelle il n’était qu’un simple salarié avait trouvé un emploi au Katanga en République Démocratique du Congo.
Quelques semaines après s’être portée acquéreur de MCK, NECOTRANS HOLDING va connaître des difficultés financières importantes. Sans avoir jamais pu régler aux propriétaires de MCK le montant de la transaction, en 2017, le groupe français est en liquidation. Entretemps, sa filiale MCK, rebaptisée NB MINING, est sous le contrôle de Pascal Beveraggi qui utilise ses relations congolaises pour siphonner
la trésorerie de l’entreprise et dilapider ses actifs. Fort de la protection de quelques généraux congolais proches de Joseph Kabila, Pascal Beveraggi rachète NB MINING.
Digne des épisodes les plus rocambolesques dont le monde congolais des affaires a le secret, MCK se retrouve totalement détroussée par son ancien salarié. Les propriétaires de MCK réclament le solde de la vente de leur entreprise. Ils attaquent l’homme d’affaire Corse auprès des cours et tribunaux français. Un premier jugement les déboute. Le 25 août 2017, le tribunal de Commerce de Paris donne raison à Pascal Beveraggi et ordonne la cession de NECOTRANS à sa société Octavia. Le 15 mai 2018, la Cour d’Appel de Paris casse cette décision en affirmant que les parts de MCK ne pouvaient faire l’objet d’une transaction tant que le montant de leur vente n’avait pas été intégralement payé. Le 5 février 2020, la Cour de Cassation de Paris confirme la décision de la Cour d’Appel et annule la cession de 85% des actions de NECOTRANS MINING à Pascal Beveraggi. Justice est rendue !
Toutefois, au cours des trois dernières années d’exercice, sous la direction de Beveraggi c’est à une véritable fuite en avant à laquelle on assiste dans la gestion de NB MINING. Le patrimoine est bradé. Les montants issus de l’exécution des contrats sont systématiquement détournés. En quelques mois, l’entreprise se retrouve en situation financière délicate. Elle doit plus de 50 millions de dollars à ses banquiers et à ses fournisseurs. Le passif fiscal se dégrade et prend des allures vertigineuses. Habitué en France à éluder la TVA, l’homme d’affaires corse applique la même méthode en RD Congo. En contrepartie de ses puissantes protections congolaises, il gratifie généreusement les comptes de ses
amis généraux issus du sérail de l’ancien président. L’endettement de NB MINING devient abyssal. Par contre, les fonds détournés par l’homme d’affaires corse gonflent les comptes de son
épouse à Dubaï. Afin d’échapper aux contrôles du fisc français avec lequel il reste en délicatesse, le couple organise une pirouette juridique. Aujourd’hui, Pascal Beveraggi se déclare divorcé.
La scène politique ayant évolué en RD Congo, avec l’appui d’un ami de son père et ancien patron de
NECOTRANS qui a fait carrière dans les services de renseignement français, Pascal Beveraggi se retrouve opportunément invité à la prestation de serment du nouveau Président Félix Tshisekedi. Le Corse décide de retourner sa veste. Les généraux de Kabila deviennent pour lui de plus en plus inutiles et encombrants. Tout comme le pouvoir a changé à Kinshasa, à Lubumbashi, de nouveaux visiteurs longent les murs des couloirs de NB MINING. Des protections de l’ancien régime au faveur du nouveau, il n’y a qu’un pas que Pascal Beveraggi franchit très rapidement.
Sous les yeux interloqués de ses anciens protecteurs, dans la capitale congolaise, l’homme d’affaires français fait offre de service au nouveau président en prétendant mettre ses réseaux corses à contribution afin de lui ouvrir les portes de l’Élysée.
Un aréopage digne de la cour des miracles accompagne le Corse qui s’est fait le président du FC LUPOPO. Dans cet entourage, on trouve aussi bien des anciens proches de Joseph Kabila que
des nouveaux venus. L’écosystème de Beveraggi est un cocktail détonnant. Ainsi, y retrouve-t-on un conseiller en communication bien connu des hommes de Kabila, Papy Tamba. S’il est des
gens qui attirent l’échec, il en est d’autres qui en sont tout simplement l’incarnation. Assurément, Papy Tamba fait partie de ce deuxième cercle. Sa finesse et l’intelligence de son propos n’ont de comparaison que les mensurations et la taille de ses costumes. Après avoir échoué avec Kabila, Papy Tamba conduit aujourd’hui son nouveau mentor corse sur le même chemin.
Récemment, le 24 août 2020, prétextant d’un faux attentat contre sa personne, Pascal Beveraggi a tenu une conférence de presse au cours de laquelle il a présenté Bernard Squarcini l’ancien patron des renseignements français, dit le squale, comme son conseiller en sécurité. La géographie du monde interlope dans lequel navigue Pascal Beveraggi est caractérisée par un conglomérat de personnalités diverses relevant les unes du monde des affaires, les autres du renseignement et d’autres encore de la communication.
Mais derrière le clinquant qui relève de la mythologie du voyou se cachent des personnages à la réputation sulfureuse qui ont pour la plupart maille à partir avec la justice de leur pays. Une véritable mafia s’est installée.
Aujourd’hui, l’État congolais en est la première victime. Pascal Beveraggi lui doit plus de 100 millions de dollars au titre de fraude à la TVA. A l’heure où les parents ont toutes les peines à remettre les enfants à l’école et au moment où le pays fait face à la plus grave crise financière et sanitaire de son histoire, fermer les yeux sur de tels agissements relèvent au mieux de la naïveté la plus stupide au pire de la complicité la plus coupable !
Pour PT CONSEILS
ILUNGA WA NDAYE
A lire dans le numéro 1052 du Quotidien La Republique