Alliance politique: Vital Kamerhe rejeté !

Désigné par « contumace » l’un des 3 vice-présidents du Conseil national du suivi de l’accord (CNSA), Vital Kamerhe a repoussé cette couleuvre cuite à son a

La dernière sortie médiatique de Corneille Nangaa, président de la Commission électorale nationale indépendante (Céni) s’est déclinée comme une onde de choc dans le chef des hommes politiques de l’opposition, un peu comme pris de cours par une donne inattendue. Cela expliquerait les prises de position isolées et en cascade des acteurs politiques de l’opposition (mieux, des oppositions). Sans cohésion efficace et bâtie sur des intérêts égocentriques, l’opposition devenue disparate peine à ressouder ses rangs devant le pavé dans la marre jeté par la Majorité au travers le président de la Céni.

Ainsi, apportant sa contribution dans l’effort de colmatage, Vital Kamerhe, président de l’Union pour la nation congolaise (UNC) a suggéré le rapprochement de son parti avec le Rassemblement dirigé par Félix Tshisekedi. Il s’agit, pour lui, de réussir une coalition de Congolais « de l’opposition comme des citoyens indépendants » contre le régime en place pour exiger la tenue des élections en décembre 2017 conformément à l’accord de la Saint-Sylvestre. Mais le président de l’UNC écarte d’emblée l’idée d’un regroupement autour d’un individu ; il plaide pour une coalition « basée sur des valeurs ». Lesquelles ? Motus !

Une chose est vraie, cette recette sempiternelle n’a jamais décliné son contenu. L’opinion est demeurée sur sa soif de connaître les valeurs derrière lesquelles Vital Kamerhe court. Ce faisant, on est réduit à scruter les gestes et faits de ce leader des Kivu pour tenter de pénétrer sa pensée. Là se ressource la réaction énergique de Martin Fayulu rejetant la main tendue du président de l’UNC. « Si Vital Kamerhe adhère au Rassemblement, moi, je quitte », a tranché le président de l’ECIDé et de la plateforme Dynamique pour l’unité d’actions de l’opposition, visiblement très en colère. « S’il vous plaît, arrêtez ce débat, si Vital Kamerhe adhère au Rassemblement moi, je quitte. Laissez-le faire sa propagande où il veut. Que monsieur Vital Kamerhe arrête, qu’il arrête. S’il vous plaît. S’il vous plaît. Monsieur Vital Kamerhe est un ami à Monsieur Kabila », s’est-il exprimé à la presse.

Toutefois, le conclave du Rassemblement promis par Martin Fayulu tarde à prendre corps ; un rendez-vous de haute signification devant permettre de dégager la riposte commune de l’opposition face au ballon d’essai lancé par Corneille Nangaa, président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Les cogitations devront concerner le Rassemble- ment et tous les alliés auxquels l’UNC voudrait se joindre. Mais le parti de M. Kamerhe essuie le refus catégorique des jokers de la plateforme, notamment Jean-Claude Vuemba et Martin Fayulu.

Approchés, maints cadres du Rassemblement reprochent à Vital Kamerhe un comportement ambigu à la base, dans certains cas, des déboires subis par l’opposition. Et de rappeler le plus récent cas de la participation de l’opposition au dialogue convoqué par le président Kabila ; Vital Kamerhe se serait distingué par un activisme déroutant qui l’a vu tour à tour à Brazzaville (République du Congo), à Lomé (Togo), dans les bras du facilitateur Edem Kodjo, etc. Ici ressuscite l’interrogation principale de savoir le vrai contenu des « valeurs » prônées par le président de l’UNC. De tous les temps, Kamerhe viole la discipline du groupe pour poursuivre ses intérêts personnels, avant de se raviser promptement lorsqu’il bute sur du roc. C’est ce qui justifie sa participation à la fois au dialogue de la cité de l’Union africaine, au sortir duquel il s’est retrouvé à la tête d’un regroupement avant de prendre part aux assises du centre interdiocésain.

Sous quelle casquette l’élu de Bukavu entend-il rejoindre les rangs du Rassemblement, s’interroge-t-on. En clair, Kamerhe est accusé de saper tout effort de l’opposition de se constituer un bloc en béton contre la Majorité qui tergiverse sur la dynamique des élections. Pour justifier sa participation au dialogue de la cité de l’UA, l’homme a brandi l’impératif de la paix au profit de la population. On lui rétorque aujourd’hui que sa participation n’a apporté ni paix ni tenue d’élections dans les meilleurs délais ; tout le contraire, car le grand Kasaï s’est embrasé et l’accord de la Saint-Sylvestre rangé dans les placards. Démenti à grande échelle, Vital aurait-il encore un mot plus fort que le silence ?

L’homme est désormais en quête de béquilles devant lui permettre de rebondir sur la scène politique d’autant que son aura n’est nullement sortie intacte de ses derniers comportements ayant frisé la trahison. On rappelle que le président sectionnaire de l’UNC/Nord-Kivu avait initié des consultations pour apprécier si son entité devait quitter ou non le parti de M. Kamerhe. Autant dire que même dans le Kivu des intelligences ne partagent pas toujours la prestation politique du président de l’UNC. Au sein du Rassemblement, on se remémore les péripéties de l’alliance Vital Kamerhe – Etienne Tshisekedi dont l’éclatement aux ultimes instants avait fini par desservir le candidat de l’opposition à la présidentielle de 2011. Un cauchemar que l’on voudrait éloigner à tout prix et au moment opportun.

Pourtant lors d’une tournée dans le Bas-Congo, Vital Kamerhe avait affirmé publiquement au cours d’un meeting public tenu dans la ville de Matadi, qu’il était prêt à s’effacer afin de promouvoir la seule candidature d’Etienne Tshisekedi, les choses vont se gâter de manière inattendue. Aujourd’hui repoussé, quel est le destin immédiat du président de l’UNC ? Vital Kamerhe devrait apprendre à rassurer les partenaires, mais surtout à savoir s’effacer pour respecter l’étoile du voisin pour attendre son tour.

Remake.

4) 16/06/2011 (RFI). Kamerhe : «Tshisekedi a un contentieux avec le Kivu qui n’a pas encore été réglé». Le lendemain, dans la même émission, la réplique de V. Kamerhe à Tshisekedi est cinglante. C’est la réponse du berger à la bergère. Question : Tshisekedi gagner au Kivu ? Pour toute réponse, l’homme commence par des rires avant d’assener le coup de grâce : «Tshisekedi a un contentieux avec le Kivu qui n’a pas encore été réglé». Et de relater comment la délégation de l’opposant historique a été lapidée en 2002 au Kivu… Des doutes sur son statut d’opposant ? Réponse : J’ai quitté Kabila comme lui-même [Tshisekedi] avait quitté son ami Mobutu, ayant trouvé que nous n’allions plus dans la même direction.

6) 08/08/2011 (VOA et RFI). Kamerhe exige «les Primaires pour désigner le candidat de l’opposition aux présidentielles». Pour que l’opposition n’y aille pas en ordre dispersé, V. Kamerhe exige la désigna- tion d’un seul candidat de l’opposition. Par le truchement des «Primaires». Entretemps, depuis le 31 juillet jusqu’au 08/08/2011, E. Tshisekedi se livre à une véritable démonstration de force lors d’une tournée effectuée au Katanga dans les villes de Lubumbashi, Likasi, Kolwezi, Kipushi et Kasumbalesa. Partout où il se rend il draine d’immenses foules, poussant les observateurs à revoir leurs calculs.

7) 09/08/2011 (Kinshasa, Stade des Martyrs). Le «Oui mais …» de Tshisekedi à Kamerhe. C’est devant une foule estimée à 70.000 âmes que Tshisekedi, revenu le même jour de sa tournée katangaise, répond à Kamerhe. A la fin de son discours, il fait enfin référence aux négociations en cours en vue de designer un seul candidat pour l’opposition. Sans citer une seule fois le nom de Kamerhe, il déclare : «Nous sommes d’accord sur le principe. Mais notre position est que les négociations n’auront pas lieu entre individus mais plutôt entre partis politiques. Donc que chacun mette d’abord de l’ordre dans sa propre maison». Traduction : les prétentions des uns et des autres doivent être au prorata de la capacité de mobilisation de chaque parti politique. Or tout le monde peut voir et juger la nôtre. Que les autres en fassent autant et nous discuterons !

8) 02/09/21011 (Kinshasa). Tshisekedi lance l’ «Appel au peuple Congolais» et affirme : «J’ai décidé de présenter ma candidature». Depuis plusieurs jours déjà les négociations entre opposants sont dans l’impasse. Pire, elles sont bipolaires. Le Groupe de l’Hôtel Sultani, qui soutient Kamerhe, s’est mis d’accord sur un programme de gouvernement commun. L’autre, le Groupe de Fatima, a désigné Tshisekedi candidat aux présidentielles, ce que conteste Kamerhe et ses amis, Kengo compris. Lorsqu’il lance son Appel au peuple Congolais, on sent comme un point de non-retour. Tshisekedi a décidé d’être candidat «parce que l’avenir de ce pays ne peut être indéfiniment laissé entre les mains de ceux qui, de façon notoire et répétée, se distinguent par la duplicité de leur langage politique, leur goût effréné pour le gain facile, leur mépris total de la vie humaine et de la souffrance de leurs semblables». A moins d’un revirement de dernière minute, les ponts semblent coupés entre Fatima et Sultani.

9) 05/09/2011 (Kinshasa). E. Tshisekedi dépose sa candidature à la CENI et décrète unilatéralement la fin des négociations avec Kamerhe et ses amis. Si dans son Appel au peuple Congolais on sentait une rupture avec Kamerhe, il y manquait la forme. C’est ce qui est fait lorsque l’opposant historique dépose sa candidature à la CENI et déclare à RFI : «Par ce geste, je viens de clore définitivement les négociations en cours «. Interrogé à propos de l’union de l’opposition vue par beaucoup comme une panacée, il balaie l’idée d’un revers de main : «C’est une légende», dit-il.

10) 07/09/2011 (Kinshasa). Kamerhe dépose sa candidature à la CENI et déclare «tendre la main» en vue d’un candidat unique de l’opposition. Deux jours après, c’est au tour de V. Kamerhe de se présenter à la CENI afin d’y déposer sa candidature. A la sortie du bureau il ajoute néanmoins qu’il «tend la main» aux autres pour un candidat unique de l’opposition.

12) 02/10/2011 (Radio Okapi, Kinshasa). V. Kamerhe se félicite de la «flexibilité» de Tshisekedi et espère le rencontrer bientôt. Après les rencontres Bemba-Tshisekedi et Kengo-Tshisekedi, la réaction de V. Kamerhe est venue ce matin sur Radio Okapi. Le leader de l’UNC se félicite de la «flexibilité» de Tshisekedi qu’il «espère rencontrer bientôt». A-t-il craint d’être court-circuité et d’être laissé au bord de la route et de voir une alliance Tshisekedi-Bemba se former à son détriment ? L’avenir nous le dira.