Choc, tristesse, déni… La Côte d’Ivoire a encore du mal à accepter le décès, ce lundi 12 août 2019, d’Arafat DJ, un artiste qui aura rythmé de ses concepts, ses tubes, mais aussi ses frasques, la vie musicale de la Côte d’Ivoire et au delà.
À Abidjan, capitale économique ivoirienne où vivait l’artiste, ses fans surnommés les « Chinois » en raison de leur nombre, ont bien du mal à accepté la réalité. À la Polyclinique des Deux Plateaux où Arafat a rendu l‘âme, ils sont nombreux à jubiler, affirmant que l’artiste s’est réveillé de son coma.
Mais la réalité est bien plus tragique. Arafat Dj est mort. Dans la matinée de ce lundi 12 août, le ministre ivoirien de la Culture, Maurice Kacou Bandama, a confirmé le décès d’Ange Huon Didier, figure emblématique du coupé-décalé, dont le succès s‘établit dans toute l’Afrique francophone. Selon des informations publiées sur la chaîne nationale ivoirienne, RTI, le ministre de la Culture a présenté « ses condoléances à sa famille et à tous les mélomanes ivoiriens et entend prendre toutes les dispositions de concert avec le Chef de l’Etat pour les hommages et obsèques à l’artiste et invite tous les mélomanes à la retenue et au calme ».
Fils d’artistes – sa mère Tina Glamour (chanteuse controversée du début des années 90) et son père Pierre, alias Wompi (arrangeur décédé) – Arafat DJ a grandi dans les quartiers endiablés de la commune de Yopougon. Si la famille vit dans l’opulence, les parents ne sont jamais présents. Conséquence, le jeune garçon sombre rapidement dans les excès tels que la drogue et la violence.
Son refuge, la musique pour laquelle il exprime un attrait, notamment le coupé-décalé, un rythme fusionnant rock, percussion et hip-hop, inventé au début des années 2000 à Paris par feu Douk Saga. Avec son titre Jonathan – hommage à son idole de la musique – sorti au début de la décennie 2000, Arafat, à peine sorti de l’adolescence, réalise un coup de maître. Après une traversée du désert entre 2005 et 2007 en France – d’où il fut rapatrié – s’en suit alors plus d’une décennie au top niveau du coupé-décalé.
Clashs récurrents
Des titres, des concepts à succès, Arafat dispose aussi d’une armoire à récompenses bien fournie. Première artiste coupé-décalé vainqueur du MTV du meilleur artiste africain, deux fois vainqueur des Kora Awards, “meilleur artiste de l’année” aux Awards du coupé-décalé en 2016 et 2017.
Si ces fans se remémoreront pendant longtemps cette suprématie sur le coupé-décalé, ils n’en oublieront pas le chapelet de frasques qui a animé la vie de l’artiste. Facebook Live incendiaires, clashs réguliers avec ses confrères dont Serges Beynaud, Debordo Leekunfa, Molare,violences conjugales, conflits avec sa mère… Sur ses réseaux sociaux, l’artiste ne manque aucune occasion de lancer des pics à qui il veut.
« Les clashs, ça a commencé parce que je voulais montrer que j’étais le numéro un de la musique ivoirienne. Surtout, ça m’aide à inventer de nouveaux sons, j’ai besoin de concurrence pour trouver de l’inspiration, explique-t-il. Quand le monde de la musique dort, il faut le réveiller ! Notre rivalité n’est que musicale, il ne faut pas prendre tout cela au sérieux », confiait-il en mars 2018 à Jeune Afrique.
Ce lundi, toutefois, la grande famille du coupé-décalé, y compris ses plus fidèles « ennemis » n’ont pu s’empêcher de le hisser en tête de leurs pages de réseaux sociaux. Car si Douk Saga était le précurseur du mouvement, Arafat en était son héritier.