« A malin, malin et demi », dit un vieil adage. En tout cas, le FCC est en mauvaise passe à l’Assemblée nationale où sa majorité parlementaire peut changer de camp.
A la base, le départ précipité de l’AFDC-A de la plateforme de Joseph Kabila minée par une crise interne dont les effets néfastes ne font que commencer. A la nouvelle rentrée, il n’est pas exclu de vivre une reconfiguration des rapports de forces à la Chambre basse du Parlement. Bref, une nouvelle majorité parlementaire est en gestation avec comme conséquence, la remise en cause du choix du Premier ministre.
Comme en 2015, le FCC, plateforme majoritaire à l’Assemblée nationale, a commis la même erreur, lorsque sept partis de la Majorité présidentielle ont suscité le débat pour recadrer la direction politique de la MP. Finalement, ils ont été exclus sans ménagement, les obligeant à créer le G7.
Quatre ans après, le naturel est revenu au galop. Le FCC a géré avec sentiment les ambitions en son sein au point de susciter la fronde menée par l’AFDC-A de Modeste Bahati Lukwebo. Ce dernier n’a pas apprécié le mode opératoire qui a conduit au choix du candidat du FCC au perchoir du Sénat. Comme si l’histoire devait se répéter, le FCC a pris le même raccourci, en excluant de manière cavalière Modeste Bahati, autorité morale de l’AFDC-A. Sans en mesurer les conséquences politiques, le FCC venait de se tirer une balle dans les pieds.
En effet, le départ de l’AFDC-A du FCC est lourd de conséquences. C’est toute la carte politique de l’Assemblée nationale qui doit être revue. Quand on sait que l’AFDC-A représentait, jusqu’à son exclusion du FCC, la deuxième force politique du FCC, les conséquences ne pourraient qu’être dramatiques. En réalité, c’est une nouvelle majorité parlementaire qui est en gestation à l’Assemblée nationale. Les lignes devraient bouger indubitablement.
Des voix discordantes autour de Kabila ?
A première vue, le départ de Bahati du FCC ampute la plateforme de Joseph Kabila d’une cinquantaine de députés nationaux. Si, pour l’instant, le FCC peut encore revendiquer une majorité à l’Assemblée nationale, la fonde suscitée par l’AFDC-A dans ses rangs a fini par ramener à la surface les profondes frustrations qui le rongent.
Autour de Joseph Kabila, des voix discordantes commencent à se faire entendre. Le mauvais traitement dont ont été victimes certains alliés du PPRD dans le FCC, dont l’AAB et l’AABC ont créé de vives tensions au sein de la plateforme. Les mécontents et autres aigris condamnent unanimement la forte mainmise du PPRD dans la conduite du FCC. Et certains, plus audacieux à l’instar de Bahati, se sont émancipés du FCC. Ce tsunami politique qui souffle est tel que, à terme, le FCC pourrait bien perdre sa majorité à l’Assemblée nationale.
A la présidence de la République, on suit de très près la vague qui secoue les rivages du FCC. Félix-Antoine Tshisekedi n’attend plus que le bon moment pour rebondir, la grogne qui gagne les rangs du FCC étant une belle aubaine pour lui. En raison des relations tumultueuses qui lient le CACH au FCC, il pourrait bien saisir l’opportunité pour jouer une carte d’émancipation vis-à-vis de Joseph Kabila. Cela passerait par la réfection de la majorité à l’Assemblée nationale. Et par voie de conséquence, l’identification de la nouvelle majorité parlementaire remettrait en cause le choix d’Ilunga Ilunkamba comme Premier ministre.
En tout cas, pour l’instant, tous les partis et regroupements politiques sont en ébullition. Au FCC, on tente tant bien que mal de colmater les brèches, après la décision à l’emporte-pièce prise en l’encontre de l’AFDC-A et de son autorité morale, Modeste Bahati Lukwebo. Des lignes bougent. En réalité, on tend vers une refonte de la carte politique de l’Assemblée nationale. Le départ de Bahati aura été lourd de conséquences pour le FCC, obligé de batailler sur tous les fronts pour sauvegarder son unité qui ne tient plus qu’à un fil.
En interne, ils sont nombreux à vouloir suivre la voie tracée par Bahati. Si certains tiennent encore à la loyauté envers l’autorité morale du FCC, c’est juste par le fait des brimades et intimidations de tous genres. Modeste Bahati l’a d’ailleurs prédit lors d’un entretien avec la radio Top Congo, émettant depuis Kinshasa. « D’autres vont suivre », avait-il déclaré.
Retour à la case départ
D’ores et déjà, Modeste Bahati a annoncé ses couleurs. Il ne se considère pas comme faisant partie de l’Opposition. Il est certain de se retrouver, avec son AFDC-A, dans la nouvelle majorité parlementaire qui pourrait probablement se former autour du CACH. Tout dépend donc de l’attitude du CACH. Soit le CACH peut continuer son deal avec le FCC, soit il fait appel à l’AFDC-A pour constituer une nouvelle majorité parlementaire.
On tend donc vers le retour à la nomination d’un informateur pour identifier la nouvelle majorité parlementaire. A tout prendre, c’est le retour à la case départ, c’est-à-dire nommer un informateur pour déceler la majorité parlementaire d’où sortira le Premier ministre. Il faut dès lors craindre que Sylvestre Ilunga Ilunkamba, nommé Premier ministre le 20 mai 2019, ne soit finalement qu’un Premier ministre mort-né ; victime du tsunami politique qui a fini par rabattre les cartes à l’Assemblée nationale.