Calendrier électoral : la cacophonie

Depuis le 26 novembre dernier, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) avait rendu public le canevas des opérations électorales attendues l’année prochaine. Un geste salué par tous les esprits acquis au respect de la Loi fondamentale et, ce faisant, opposés à tout éventuel glissement du mandat des animateurs actuels. Mais la publication du calendrier électoral constitue-t-elle un gage suffisant du respect du calendrier édicté par la Constitution de la République ? Les avis divergent, les uns et les autres puisant parfois dans le cœur au lieu de sonder l’esprit.

Tout naturellement, l’UDPS et ses alliés de l’Union sacrée ont laissé éclater le sourire, accordant tout le crédit nécessaire à cette mouture. Pour eux, la publication du canevas déjoue tous les pronostics distillés par ceux qui crédite le pouvoir des manœuvres visant à retarder les échéances des scrutins électoraux. Parmi ces partenaires figure en bonne place le MLC qui bat déjà campagne pour le plus d’enrôlement possible des Congolais.

La lecture n’est cependant pas du goût du PPRD pour qui l’application de ce calendrier est simplement utopique. Ce parti s’appuie notamment sur le délai relativement court consacré à l’enrôlement des électeurs. Par la voix de son secrétaire permanent, Ferdinand Kambere, le PPRD souligne : « Lorsqu’ils veulent tromper les gens qu’ils vont arriver à enrôler trente millions ou cinquante, mais par quel moyen ils vont le faire ? Pendant un mois, ils vous disent qu’ils vont enrôler par aire géographique et il y a trois aires comme ça. Est-ce que nous aurons encore dans ces provinces-là, le nombre d’électeurs qu’il y avait ? Et comment on va les avoir parce que cette coïncidence aussi, en même temps où nous voyons le gouvernement négocier un cessez-le-feu contre toute attente, il demande un déploiement des armées étrangères à l’Est de notre pays, est ce que c’est comme ça qu’on va réellement organiser les élections ? De qui se moque-t-on ? Les populations se déplacent, est-ce qu’ils ont encore la cartographie démographique de notre pays ? ».

Interrogation destinée certes à Denis Kadima, le président du bureau de la Centrale électorale. Et le PPRD n’a pas la mémoire courte ; le parti remonte les gradins pour rappeler que tout le processus enclenché par le pouvoir est jusque-là inique, en ce que les observations et les desiderata de l’opposition n’ont jamais été pris en compte. « La première impression est celle du mépris non seulement du peuple congolais, mais aussi de la constitution et même de la démocratie dans notre pays. Parce que, c’est depuis longtemps que l’opposition a réclamé qu’il y ait consensus pour crédibiliser ce processus électoral, mais ils n’ont pas voulu du tout. Donc, c’est un calendrier publié par une CENI non reconnue par l’opposition », a déclaré Me Ferdinand Kambere.

Par ailleurs, plusieurs partis politiques notent qu’il ne se dégage pas assez de lisibilité sur l’enregistrement des partis et regroupements politiques. La crainte est de voir s’impliquer dans les élections plusieurs structures sans existence légale et donc non qualifiées pour participer aux élections. Sur le plan de la logistique, les premières inquiétudes viennent de la Monusco qui est aujourd’hui en phase de redéploiement et de retrait de plusieurs zones. L’on sait, en effet, que l’appui logistique terrestre et aérien avait été plus que déterminante pour le déploiement des matériels électoraux par le passé. Mais aujourd’hui déjà, le Gouvernement est en conflit ouvert avec la Monusco qu’elle a demandé de se retirer sans attendre ni prendre en compte le plan prévu et arrêté de commun accord.

De son côté, le parti Envol compte tenir Denis Kadima et son équipe pour responsable de tout dérapage, tout en s’engageant dans le processus en cours. A l’issue d’une réunion de circonstance, l’Envol relève qu’en lieu et place d’un calendrier cohérent d’un point de vue opérationnel, la CENI « s’est fourvoyée à publier une simple feuille de route assortie des dates soumises à des multiples contraintes qui n’offre aucune garantie à la tenue des élections libres, transparentes, dans le respect du délai constitutionnel ». Avant de préciser : « Par cet acte, la CENI a troqué sa casquette d’expert tant vantée, contre les manipulations politiques qui voilent à peine le manque de volonté du pouvoir à organiser les élections dans les délais ».

À cet effet, l’Envol relève 5 écueils notamment la réduction fantaisiste à 100 jours, le délai d’enrôlement par aire électorale, contre 120 jours observés lors des précédents cycles électoraux. D’après cette formation politique de l’opposition, cela n’est fondé sur aucune amélioration significative de l’infrastructure logistique du pays.

« Cet écueil est d’autant plus prégnant que le soutien logistique jadis offert et mobilisé par la MONUSCO, dans le déploiement du matériel et son acheminement ne sont pas au rendez-vous ».

LR