Le Chinois Startimes à la conquête de l’audiovisuel en Afrique

La société chinoise revendique 7 millions d’abonnés à ses bouquets payants en Afrique.

Le ministre de l’information et de la communication de Sierra Leone, ses homologues gambien, nigérian, ou encore tchadien : avec 300 délégués venus de 39 pays, la sixième édition du séminaire de Pékin sur le développement de la télévision numérique en Afrique a incontestablement fait le plein les 23 et 24 juin derniers. Preuve du chemin parcouru, ils étaient dix fois moins nombreux pour le premier opus, en 2011, avec une douzaine de capitales représentées seulement. L’occasion pour les délégués d’échanger sur leurs expériences alors que se profile à vitesse grand V l’extinction des signaux analogiques. Mais surtout l’occasion pour Startimes, le grand sponsor de la manifestation, de convaincre le maximum d’entre eux d’en passer par ses services pour mener la complexe et coûteuse transition vers la TNT.

Startimes ? Sans aucun doute, un maillon très important de la stratégie de soft power de Pékin. Créée en 1988, c’est la seule société privée habilitée à investir dans la radio et la télévision à l’étranger. Pour faire simple, l’équivalent de Sagemcom, Thomson Broadcast et Canal+, réunis. Soit, dans un même panier, les décodeurs, les infrastructures de diffusion et les chaînes de télévisions, plus de 200 en tout, internationales, locales, ou chinoises. « Ils contrôlent toute la chaîne », confirme un professionnel de l’audiovisuel.

L’exploration de Startimes en Afrique a commencé en 2007, avec un premier bureau au Kenya, cinq ans après que son président, Pang Xingxing, a réalisé tout le potentiel du continent noir. Présent dans une trentaine de pays, mais n’opérant que dans la moitié environ, la société revendique plus de 7 millions d’abonnés à ses services de télévision payante, ce qui en fait un acteur incontournable. Et un acteur qui ne compte pas s’arrêter là puisque son but est d’être présent dans 30 millions de foyers africains d’ici à 2018 !

Certaines des séries chinoises que Startimes a diffusées ont rencontré un grand succès, comme « Beautiful Daughter in law » en Tanzanie. Pour pénétrer l’Afrique de l’Ouest, la société cherche régulièrement à Pékin des francophones pour des séances de doublage. Et pour mieux s’ancrer régionalement, elle a développé des programmes dans les langues les plus parlées, comme l’Haoussa au Nigéria. Quant aux abonnements, ils sont adaptés au pouvoir d’achat local. Au Rwanda par exemple, l’offre d’entrée de gamme coûte l’équivalent de 2,9 euros par mois et donne accès à 21 chaînes. Le bouquet premium, lui, revient à 15,6 euros avec 73 chaînes à la clé.

Pour mener ses campagnes dans la TNT en Afrique, Startimes peut compter sur toute la machine diplomatico-financière de Pékin. Banque d’import-export, ICBC ou encore fond public pour le développement sino-africain : ce n’était pas un hasard si quelques-uns des plus grands établissements financiers étaient présents au séminaire de juin. Le « package » financement + solutions technique complète, c’est la force du modèle chinois pour « aider » les Etats africains, en retard et pour nombre d’entre eux en mal d’argent, à passer à la TNT. A condition d’accepter une situation de « rente » qui permet à Startimes de prélever sa dîme sur 25 à 30 ans, dénoncent ses concurrents.

Via Les Echos