Entretemps, le pays tourne au ralenti.
Plus d’un mois après la nomination le 15 février dernier, du Premier ministre Jean-Michel Sama Lukonde Kyenge, la RD Congo n’a toujours pas de Gouvernement. A ce jour, personne ne saurait parier ni sur la date ni sur le jour de la sortie de l’Exécutif estampillé Union sacrée de la nation. Le moins que l’on puisse savoir au stade actuel, est que les nouveaux partenaires du Président Félix Tshisekedi ont convenu de la clef de répartition de postes ministériels, en fonction de leurs poids politiques respectifs.
Même si rien n’est encore officiel, certaines indiscrétions renseignent que le parti présidentiel aura droit à huit ministères. Par contre, Ensemble pour la république de Moïse Katumbi aurait 5 ministres et un vice-ministre. Par contre, deux ministères seraient réservés au MLC. L’UNC de Vital Kamerhe, ancien directeur de cabinet et allié politique de Félix Tshsiekedi, aurait également le même quota. C’est-à-dire deux ministres au sein du futur Gouvernement.
En ce qui concerne l’Union pour la démocratie et le progrès social, parti au pouvoir, son Secrétaire général Augustin Kabuya a déclaré le dimanche dernier, à l’occasion de l’installation de la fédération du Mont-Amba, que de 82 candidats enregistrés au départ, ils en seraient à 135 pour les huit postes ministériels qui leurs reviennent. Cette pléthore de candidatures serait elle à la base du retard observé dans la mise en place du nouveau Gouvernement ? Sinon, qu’est-ce qui bloque ?
Toutefois, des sources concordantes renseignent qu’il se pose encore des problèmes au sein de l’Union sacrée en lien avec la répartition des postes. D’où, les conciliabules en cours qui tendent à s’éterniser. Question cependant, à qui profite ces atermoiements motivés beaucoup plus par les intérêts personnels que par la cause du pays réel ? En tout cas, pas au Président Félix Tshisekedi dont le temps ne semble pas être le meilleur allié pour les trois années restantes de son quinquennat.
FACE A LA PLETHORE…
Pléthore de candidatures à l’Udps ? C’est le cas de le dire, au regard des chiffres révélés par le Secrétaire général du parti. Dans tous les cas, quelle que soit sa disponibilité à contenter ses nouveaux partenaires, Félix Tshisekedi ne saurait pas former un Gouvernement avec tout le monde. Par rapport à l’équation à plusieurs inconnues de l’Udps, d’aucuns jugent que le Chef de l’Etat se trouve dans une situation délicate de gestion des ambitions. « Prévisible », réagissent tout de suite des analystes politiques alertes ayant suivi le mécanisme qui a abouti au changement de la majorité parlementaire.
Cependant, compte tenu de l’impératif de temps et des défis à relever, des Congolais de plus en plus nombreux, invitent le Président Félix Tshisekedi à trancher. Car, on doit savoir mettre fin aux négociations en cours pour permettre à Jean-Michel Sama Lukonde d’avoir son équipe.
Pendant que les pourparlers entre les composantes de l’Union sacrée tirent en longueur, l’impatience monte de plus en plus dans les rues de Kinshasa. Que de supputations et de questions sans réponses!
ENTRETEMPS, LE PAYS TOURNE AU RALENTI
Pendant que les tractations sur le choix des candidats tirent en longueur, on assiste à une sorte de paralysie des institutions du pays qui ne dit pas son nom. Justement, parce que le Gouvernement est l’épicentre du champ institutionnel. A quoi bon d’avoir un parlement bicaméral qui fonctionne déjà si, en face, l’Assemblée nationale et le Sénat n’ont de Gouvernement responsable ?
Ici comme ailleurs, le Parlement a pour mission de contrôler l’Exécutif et de légiférer. Il prend des initiatives de lois et les vote pour que le Gouvernement les exécute à son tour. Cependant, il se trouve malheureusement qu’au stade actuel de la situation, on ne peut pas envisager un quelconque contrôle parlementaire à cause de l’inexistence du Gouvernement. De ce point de vue, nul ne saurait donc accuser les parlementaires, ni de léthargie ni d’inertie.
De l’avis de nombreux observateurs et analystes de la scène politique du pays, les atermoiements autour de la formation du Gouvernement Sama Lukonde sont manifestement en contradiction avec les défis himalayens auxquels la RD Congo fait face. A ce jour, par exemple, nombre d’acteurs sociaux et politiques se projettent dans l’horizon 2023 pour un nouveau marathon électoral. En même temps, on ne doit pas considérer cette échéance comme lointaine. Bien au contraire. Cette nouvelle bataille démocratique aux urnes doit se préparer dès maintenant compte tenu de son caractère dispendieux ou onéreux.
L’expérience des trois derniers cycles électoraux renseigne que l’organisation des élections en RD Congo nécessite plusieurs centaines de millions de dollars américains. En 2006, par exemple, le budget global des élections convenu à l’époque de manière ferme entre le Groupe consultatif de la Banque Mondiale et la Commission électorale indépendante (CEI), avait été de 285 millions de dollars américains dont 90 millions en fonds fudiciaires géré par le PNUD, rien que pour l’achat d’équipement d’enregistrement des électeurs et autres fournitures.
La différence, soit les 185 millions restants devraient servir aux achats de véhicules et autres divers. A ce budget global, il fallait ajouter la logistique dont le coût s’était évalué à 103 millions de dollars américains.
Quant au troisième cycle électoral initialement prévu en 2016 mais qui a abouti en 2018, l’ancien bureau de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) avait évalué à environ 1,8 milliards de dollars américains. Rien que pour la sécurisation du processus électoral, un budget de 53 millions de dollars américains avait été présenté par le Comité de pilotage des élections. Face aux difficultés financières, le Gouvernement d’alors s’était engagé à faire sa part de contrat, en acceptant un décaissement trimestriel de fonds. Ce rappel historique montre le rôle prépondérant que joue l’Exécutif national dans les préparatifs, l’organisation et le déroulement du processus électoral en RD Congo.
L’argent étant le nerf de la guerre, dans la situation actuelle du pays, ce n’est pas avec un gouvernement Ilunkamba en affaires courantes, qu’il faille attendre un décaissement important pour préparer les élections prévues en 2023.
Vu des analystes, plusieurs raisons en interne ne concourent nullement aux conciliabules sans fin des sociétaires de l’Union sacrée de la nation, autour de la formation du Gouvernement. Bien au contraire. Le temps n’étant pas le meilleur allié de l’actuel Président Félix Tshisekedi, on devrait donc appuyer sur la pédale de l’accélérateur pour éviter de donner raison à plusieurs millions de Congolais qui ne cachent plus leur pessimisme quant à la tenue des élections en 2023.
La plus belle femme du monde ne pouvant donner que ce qu’elle a, il ne faudrait pas que les arbitrages en cours s’éternisent. Dans tous les cas, les Congolais n’attendent pas un Gouvernement exceptionnel qui viendrait du ciel. C’est plutôt un Exécutif qui sera formé des figures, peut-être bien connues de la nouvelle classe politique. Moralité, il appartient au Chef de l’Etat de faire ce qui est possible, pourvu que l’appareil d’Etat fonctionne normalement parce qu’il y a blocage.
Forum des As / MCP, via mediacongo.net