Félix Tshisekedi pour remplacer Etienne Tshisekedi !

La principale coalition d'opposition congolaise a préconisé mardi à Kinshasa l'organisation d'une "transition de six mois

Pendant qu’il embarque l’opinion dans la campagne anti-révision constitutionnelle, le parti dénommé Udps vit une situation fort complexe : la violation systématique et systémique de sa « constitution », à savoir les statuts. Une remise-reprise s’opère entre Etienne Tshsiekedi le père et Félix Antoine Tshisekedi le fils. N’en déplaise à ceux qui soutiennent le contraire : dans son communiqué du 8 avril 2014 annonçant l’arrivée de ce dernier à Kinshasa, le Secrétariat Nationaux aux Relations Extérieures déclare clairement que c’est  » pour donner du tonus aux activités de l’UDPS sur le terrain » et ajoute, citation :  » …le Secrétaire National est porteur de la nouvelle stratégie de repositionnement de l’UDPS qui doit remobiliser le peuple congolais et les partenaires tant nationaux qu’internationaux face aux enjeux de l’heure… ». Fin de citation. Comment alors expliquer que le « ministre des Affaires étrangères » vienne se substitue aux « ministre de l’Intérieur » au vu et au su du « couple présidentiel », sans que cela n’apparaisse à un coup d’Etat-maison ?

Non référencié à l’instar de tous les communiqués qui émanent ces temps derniers du Secrétariat national aux relations extérieures (Snre) dirigé par Félix Antoine Tshisekedi, le communiqué du 8 avril cite parmi les enjeux de l’heure :  » les conséquences du hold-up électoral, la grande menace sur la constitution, l’insécurité permanente à l’Est du pays, stratégiquement entretenue par M. Kabila pour des raisons obscures, les échéances électorales en perspectives, avec en toile de fond, le retour de l’Abbé Malu-Malu, l’homme aux antécédents douteux, à la Céni ».

Il ajoute, dans le troisième paragraphe :  » L’UDPS sera bientôt sur une nouvelle orbite, déclare Félix Antoine Tshisekedi avant de quitter Bruxelles, l’UDPS et le peuple Congolais ont déjà gagné en droit, ils doivent maintenant gagner dans les faits. Si les Congolaises et les Congolais ne prennent pas leur destin en mains, personne ne le fera à leur place », a conclu le Secrétaire National aux Relations Extérieures, annonçant les couleurs de son séjour en RDC ».

Quelle analyse en faire ? La première est l’aveu même, par l’Udps, soit du ralentissement, soit du blocage du fonctionnement du parti. Prenons du ralentissement pour ne pas blesser certaines susceptibilités.

Deux expressions incitent à y croire rien qu’à partir du contenu dudit communiqué. D’abord « donner du tonus », ensuite « remobiliser le peuple et les partenaires » extérieurs. Ou même trois : « l’Udps bientôt sur une nouvelle orbite ».

Cet aveu procède d’un diagnostic posé.

Toute la question est cependant de savoir si, justement, le constat est réel. C’est la seule condition pour préconiser une thérapeutique adaptée.

D’emblée, la réponse est non. Car la crise, arrivée à maturation, qui prévaut au sein de l’Udps ne remonte pas à la présidentielle de novembre 2011 avec le fameux « hold-up électoral » dont on rabat l’opinion les oreilles. En elle-même, cette photo présentant Valentin Mubake en meeting à l’Est vaut toutes les réponses susceptibles d’être données :

L’Udps, en réalité, est en crise depuis les années 1990. Il a fallu la chute de Mobutu en mai 1997 pour la voir dans toute sa nature et dans toute sa laideur.

A l’origine – nous l’avons dit plus d’une fois au cours de ces deux dernières années – le choix fait par Etienne Tshisekedi de focaliser sa lutte politique non pas sur le « projet de société » dérivant de la célébrissime « Lettre des 13 Parlementaires », mais sur le départ à tout prix du maréchal.

Conséquence logique : Mobutu tombé, le lider maximo a du jour au lendemain vidé de toute substance son combat. Mis, il n’a pu rien faire devant le rouleau compresseur déroulé par Laurent-Désiré Kabila hier, et aujourd’hui, il ne peut davantage rien faire devant celui déroulé par Joseph Kabila.

C’est ce que la majorité des députés Udps élus en 2011 ont compris en osant défier Etienne Tshisekedi : ils ont fait valider leurs mandats malgré la consigne contraire. Et, à l’Assemblée nationale où ils siègent valablement, ils gèrent mieux l’image Udps au pays et à l’étranger que ne le font les dirigeants du parti, dont les membres de l’organe désigné sous le vocable « Présidence ».

Gestion interne chaotique

En fait, le poids de l’âge, la maladie et la (très) longue lutte, menée moins pour la conquête du pouvoir que pour la perturbation de l’ordre public, ont raison de l’intransigeance d’Etienne Tshisekedi. Les « Parlementaires-Debout » des années 1990 sont devenus les uns grand-père, les autres pères. Et pour la plupart plus pauvres que sous Mobutu.

Or, c’est une communauté d’hommes et de femmes qui avait tout sacrifié, mais alors tout pour soutenir la lutte sacrée contre la dictature mobutienne. Ils avaient un peu soufflé avec l’avènement de l’Afdl avant d’être relancés. Maintenant, ils sont de moins en moins motivés parce qu’ils ont tiré de toutes les épreuves subies un seul enseignement : la justice distributive n’est pas le commun des mortels à l’Opposition. Ils savent, par exemple, que ce n’est pas parce que les Opposants rejettent tous les projets de loi budgétaire qu’ils ne passent pas régulièrement à la questure pour percevoir leurs émoluments et tous les avantages connexes. Ceux de la Diaspora connaissent les réalités de l’exil. D’où l’échec patent de la mobilisation initiée en vue du financement de la campagne électorale de Tshisekedi en 2011.

Bref, l’Udps a connu au cours de ses 32 ans d’existence une gestion interne tellement chaotique que pour la pénétrer, la référence indiquée est l’avalanche des « remaniements » au travers des décisions 004/UDPS/PP/011 du 10 janvier 2011 portant nomination des membres de la Présidence du Parti, 060/UDPS/PP/011 du 24 août 2011 portant réaménagement des membres de la Présidence du Parti, 082/UDPS/PP/012 du 24 mai 2012 portant réaménagement des membres de la Présidence du Parti, 087/UDPS/PP/012 du 24 mai 2012 portant réaménagement des membres de la Présidence du Parti, 104/UDPS/PP/012 du 24 octobre 2012 portant nomination des membres de la Présidence du Parti et 112/UDPS/PP/013 du 02 /04/2013 portant nomination des membres de la Présidence du Parti.

Ainsi, rien que dans la période comprise entre le 10 janvier 2011 et le 2 avril 2013, soit en deux ans et un trimestre, la présidence aura enregistré six changements dans la 2ème structure de l’Udps après la première, à savoir le Président. Et encore, tous ces remaniements s’opèrent en violation de la Constitution de la République qui dispose, à l’alinéa 2 de l’article 96, que :  » Le mandat du Président de la République est également incompatible avec toute responsabilité au sein d’un parti politique ». Preuve, si besoin est, qu’Etienne Tshisekedi se reconnaît plus en président réel de l’Udps qu’en président virtuel de la RDC.

 » Le roi est mort, vive le roi « …

On peut déduire de cette évidence que la Direction politique du parti a indubitablement échoué dans la gestion du parti, surtout à l’intérieur du pays. Car c’est l’intérieur qui influe sur l’extérieur, et non l’inverse. La base de tout parti, c’est dans les limites et non au-delà de la frontière de l’Etat.

Que Félix Antoine Tshisekedi – à comparer au ministre des Affaires étrangères – soit rentré au pays pour donner du tonus au parti – c’est bien la preuve de l’échec patent du ministre des Affaires intérieures, en l’occurrence toutes les structures mises en place du 28 janvier 2014 nommant le Secrétaire général, les Secrétaires généraux adjoints et les Secrétaires nationaux/Chefs des Départements avec leurs adjoints, le Trésorier général et ses adjoints ainsi que le Secrétaire exécutif du conseil.

La question importante est de savoir pourquoi Félix Antoine Tshisekedi – dont les fonctions viennent en troisième position dans la hiérarchie établie par cette mise en place – descend dans l’arène pour faire bouger les lignes alors que son propre bilan en qualité de « ministre des Affaires étrangères » n’est pas fameux.

La réponse se devine : il jouit de son statut spécial de fils. Ce qui lui permet de bousculer la hiérarchie et, dans la foulée, de « secouer » les statuts de l’Udps.

Ainsi, pendant qu’il agite la foule en faisant sien le mot d’ordre « Touch’pas à l’article 220 » d’une Constitution qu’il avait pourtant boycottée lors du référendum de 2005, ce parti est en train de tripatouiller sa propre « constitution » pour une remise-reprise, qui ne dit pas son nom, entre le père et le fils.

L’autre dirait :  » le Roi est mort, Vive le Roi « .

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