Après l’investiture du président de la République, Félix Tshisekedi, l’heure est à présent à la composition de l’exécutif national qui, dorénavant, sera sous la conduite d’un Premier ministre issu de la famille politique du président sortant, Joseph Kabila, qui s’est adjugé la majorité parlementaire à l’issue des élections du 30 décembre avec plus de trois cents députés.
Le président Félix Tshisekedi est appelé, au regard de la configuration politique qui lui a été imposée par la réalité des urnes, de composer avec le Front commun pour le Congo (FCC), dans le cadre d’une cohabitation qui verrait sa marge de manœuvre se rétrécir conséquemment. Coalition ou cohabitation ? Là encore, sa plateforme, le Cap pour le changement (Cach), et le FCC ont des difficultés à accorder leurs violons.
Le plaidoyer de Joseph Kabila pour la mise en place d’une coalition des forces progressistes traduit la perception du FCC sur cette question. Une manière pour la « Kabilie » de tenir encore le gouvernail du pays en poussant l’actuel chef de l’Etat à adhérer au schéma d’une nouvelle majorité FCC-Cach qui cheminerait dans l’optique d’une gestion consensuelle du pays. Du côté de Félix Tshisekedi, la tendance est plutôt de mettre en phase les deux coalitions dans la perspective d’une cohabitation avec des passerelles du pouvoir bien circonscrites entre lui et le Premier ministre. « Ce qui ressort des discours des deux chefs de coalition, c’est plutôt l’intention de former une nouvelle majorité », a laissé entendre Lambert Mende Omalanga, cadre du FCC et porte-parole du gouvernement sortant.
Une chose est sûre, la nomination d’un informateur (personnalité choisie par le président de la République pour identifier une majorité parlementaire afin de former le gouvernement en cas de cohabitation) reste la seule issue pour résoudre cette équation. C’est ce qui est dit dans la Constitution. Mais, dans la pratique, ce schéma ne pourrait forcément pas être d’application, à en croire certains cadres du FCC qui estiment que la majorité parlementaire existe déjà et qu’en lieu et place d’un informateur, il s’agit plutôt de parler d’un formateur du gouvernement. Ce dernier, issu de Cach ou de la société civile, devrait être « une personnalité consensuelle, acceptée par le FCC qui détient la majorité numérique à la chambre basse du parlement », explique une source indépendante.
Les craintes de la « Kabilie »
Pourquoi le FCC redoute-t-il la nomination d’un informateur ? D’après certaines indiscrétions, il appert que la « Kabilie » craindrait le débauchage auquel pourrait s’adonner le fameux informateur dans le but de liquéfier le FCC en le délestant de ses élus moyennant promesse des postes ministériels. Ce qui conduirait à la redéfinition d’une nouvelle majorité parlementaire où le FCC ne sera pas forcément le regroupement politique phare. La famille politique du président sortant craint, en effet, que les consultations de l’informateur ne viennent affaiblir sa majorité de facto acquise sur la base des résultats provisoires de la Commission électorale nationale indépendante aux législatives nationales.
Et pourtant, argumente-t-on du côté du Cach, cet exercice est inévitable pour que chaque député national se détermine par rapport à son parti et regroupement politique, sans compromission aucune. Ce qui permettra d’avoir un aperçu sur la configuration générale du parlement et sur la majorité parlementaire avec laquelle le chef de l’Etat aura à collaborer. Cela va lui donner le feu vert pour nommer enfin un Premier ministre dans la majorité ainsi identifiée.
Au-delà de toutes ces hypothèses, l’évidence est que le prochain gouvernement qui sera piloté par un membre du FCC sera la résultante d’une mixture entre ce regroupement, le Cach et la société civile. Ici encore, la répartition des postes entre ces composantes parmi les plus influentes poserait problème. Les pro Kabila, à en croire des indiscrétions, revendiqueraient la quasi-totalité des postes ministériels – y compris ceux de souveraineté – pour avoir donné plus des députés à la République au niveau national. Le refus du Cach de ne pas se plier à une telle exigence serait à la base du retard que prend la formation du premier gouvernement de l’ère Fatshi. Les négociations pour sa formation pourraient encore prendre entre deux à quatre semaines, révèle-t-on.
Adiac-Congo