Le président du Sénat Léon Kengo Wa Dondo dévoile un pan du mystère de la Crise de l’irruption des rebelles hutu rwandais des FDLR au en RDC après le génocide hutu consécutive à l’assassinat du président Habyarimana par les tutsi du Font patriotique. En fait de révélation, c’est ce que tout le monde savait, à savoir que l’ONU était totalement au courant du dossier.
Alors que tous les esprits étaient tournés vers la traque décisive des FDLR après l’expiration du moratoire leur accordé pour se désarmer volontairement et que les FARDC ont annoncé le lancement des opérations contre ces forces négatives rwandaises, une nouvelle crise est née dans les relations entre Kinshasa et New York depuis que l’ONU a décidé de suspendre toute collaboration avec les FARDC dans la traque décidée des FDLR.
Une décision qui a quelque peu surpris certains observateurs qui se rendent compte que, finalement, chaque fois qu’un acte décisif doit être posé pour éradiquer ces rebelles, classés par les Nations Unies comme « forces négatives », il s’observe toujours quelque chose qui vient contrarier l’initiative.
Durant les 21 années de présence des rebelles hutus rwandais sur le sol congolais, les discours ont progressivement évolué pour tenir la RDC pour responsable de cette présence aux motifs pas souvent étayés qu’elle ne manifestait aucune volonté d’y mettre fin et que l’armée nationale louait les services de cette milice pour lutter contre d’autres et contre les agressions rwandaises et ougandaises.
Très souvent également, personne ne se donnait la peine de chercher à savoir à qui profitait la présence des réfugiés hutus rwandais en RDC ou, pour mettre les choses à l’endroit, leur absence du Rwanda qui est leur pays. Question intéressante lorsque lion constate que ces réfugiés n’ont plus été depuis longtemps, considérés et identifiés comme tel, mais indistinctement comme des FDLR et, particulièrement, comme des génocidaires. Une formule certainement utilisée pour repousser le plus loin possible toute éventualité de leur retour dans leur pays. Pourquoi donc ?
Pour répondre à cette question, les archives du Congo ont parlé. Elles font parler l’un des acteurs clés qui ont eu à gérer et traiter le dossier du rapatriement des réfugiés hutu rwandais dans leur pays. Cet homme, c’est Léon Kengo Wa Dondo. Au moment de l’occurrence des événements et pendant les premières années de la gestion du dossier, il est Premier Ministre.
La connivence Mobutu-ONU-Occident
En 2001, Kengo Wa Dondo vit en exil en Belgique où le débat sur la RDC est vivace. Il répond de temps en temps à des invitations à des colloques et autres conférences pour éclairer la lanterne des Congolais sur les vérités cachées de la vie de leur mère patrie. A l’une de ces occasions, Kengo est invité à éclairer les Congolais sur le dossier des refugiés rwandais en RDC. Les révélations qu’il fait sont fracassantes. Sans ambages, en effet, l’ancien multi-Premier Ministre congolais attribue toute la responsabilité de l’enracinement des réfugiés rwandais en RDC à la communauté internationale et, tout particulièrement, l’ONU et son Secrétaire Général de l’époque, Boutros Boutros Ghali. Kengo révèle, dans une vidéo de la conférence à laquelle il avait pris part à Bruxelles en 2001, que c’est l’ONU et la communauté internationale qui avaient enrayé tous les efforts et les initiatives de Kinshasa pour rapatrier les réfugiés hutus rwandais dans leur pays ou, à défaut, séparer les militaires des civils et les éloigner tous de la frontière.
Lorsque le Gouvernement de l’époque décide du rapatriement de tous les réfugiés rwandais chez eux au plus tard le 31 décembre 1995, c’est le Président Mobutu qui l’en dissuade tout de suite, raconte Léon Kengo. A la suite de Mobutu, le Premier Ministre d’alors reçoit une avalanche d’intervention extérieure qui toutes, abondent dans le même sens que Mobutu. Boutros Ghali, Secrétaire Général de l’ONU, George Moose, Secrétaire d’Etat américain, Rochereau de la Sablière, Représentant permanent de la France au Conseil de sécurité convergent pour lui demander de suivre la voix du Maréchal Mobutu.
Autres manœuvres dilatoires
Pourtant, à l’époque, rappelle encore Kengo, la population du Kivu s’était mobilisée pour disponibiliser les moyen de transport devant ramener les réfugiés au Rwanda. La vérité, conclue Kengo, « est que la communauté internationale ne voulait pas ». « A l’époque, rappelle aussi Kengo, le Conseil de sécurité avait voté deux résolutions appelant au déploiement des forces multinationales pour constituer des couloirs de sécurité pour permettre aux réfugiés de rentrer dans leur pays dans la paix et la sécurité » comme le clamait toujours Boutros Ghali.
Coup de théâtre, au moment où l’on s’attendait à ce que ces résolutions soient mises en application, la communauté internationale va y revenir sans d’autres résolutions contraires pour annuler le déploiement des forces attendues. Motif: le Rwanda venait de bombarder les camps des refugiés et d’autres seraient déjà rentrés chez eux. Il est vrai, reconnait Kengo, que ces camps avaient été bombardés, mais par qui, s’interroge-t-il, Léon Kengo ne répond pas à sa question, mais indique seulement qu’à l’époque le Rwanda ne disposait ni d’avions de chasse ni de pilote, et ne pouvait donc pas bombarder les camps des réfugiés. Qui, alors, les a bombardés ? « Je sais qui a bombardé, mais le moment n’est pas venu », répond Kengo.
Mais pourquoi donc refusait-on le retour des rwandais dans leur pays ? A cette question, Kengo répond dans détour : « Si les refugiés étaient rentrés chez eux dans la paix et la dignité comme ne cessait de le répéter le SG Boutros Ghali, ils allaient récupérer leurs biens, leurs maisons et allaient exiger les élections. Et en vertu des dispositions de la Charte de l’ONU un homme une voix, les Hutus allaient revenir au pouvoir. La communauté internationale, Kagame et son pouvoir ne voulaient pas cela. La communauté internationale a le génocide sur la conscience et devait se décharger de ce génocide d’une manière ou d’une autre ».
Et les événements à venir vont le démontrer. Kengo dit, en effet, contacté le SG de l’ONU deux fois lors de la session ordinaire de l’Assemblée Générale de l’ONU en septembre 1994. Et Boutros Ghali l’avait invité à une réunion du Conseil de sécurité en 1995. « Il avait été entendu, raconte Kengo, que je devais convaincre les membres permanents du Conseil de sécurité pour qu’ils donnent l’argent de façon à permettre que les refugiés militaires et civils séparés puissent être installés loin de la frontière conformément à la Convention de Genève et la Convention de l’OUA ».
Par la suite, poursuit l’ancien Premier Ministre, « j’ai montré les sites (Ndlr : d’installation des refugiés) à, la Commission de l’Onu qui avait été dépêchée auprès de moi. La Commission a visité les sites de Lukandu, Irebu et Kongolo. Mais lorsque la Constitution a fait son devis, le Secrétaire Général Boutros Ghali a trouvé que c’était trop cher et qu’on ne pouvait pas le faire.
Moralité : on n’a jamais séparés les militaires des civils. On les a laissés sur place ». Et les conséquences, les Congolais les subissent encore aujourd’hui dans leur chair et dans leur âme…
Via Le Vif du Congo