François Hollande s’est mué en donneur de leçons, samedi 29 novembre, pour adresser un avertissement aux dirigeants qui, selon lui, voudraient s’accrocher au pouvoir à tout prix.
Le Président français l’a dit devant les chefs d’État et de gouvernement majoritairement africains, réunis au XVe sommet de la Francophonie à Dakar.
Quelle mouche a piqué Français Hollande du haut de la tribune du XVème sommet de la Francophonie qui s’est tenu au Sénégal ?, se demande-t-on en Afrique ?
Il faut dire que ce sommet de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) rassemblait une trentaine de dirigeants, qui ont désigné Mme Michèle Jean du Canada comme le successeur d’Abdou Diouf, ex-président sénégalais.
Même si la situation s’est compliquée depuis la chute, fin octobre, du président burkinabè Blaise Compaoré, que Paris et Abdou Diouf souhaitaient voir hériter du poste, François Hollande a indiqué ceci : « La Francophonie est soucieuse des règles en démocratie, de la liberté du vote, du respect des lois constitutionnelles et de l’aspiration des peuples, de tous les peuples à des élections libres ».
Il a cité en exemples la « leçon » de la transition tunisienne et « la belle démonstration » du peuple burkinabè, qui a poussé vers la sortie Blaise Compaoré, alors qu’il espérait briguer un nouveau mandat après 27 ans au pouvoir. Pour lui, cette transition doit servir de leçon là où les règles constitutionnelles sont malmenées et où l’alternance est empêchée.
La réaction musclée du Rwanda
Ce discours n’a pas plu aux chefs d’Etat et de gouvernement africains présents à ce sommet, et plus particulièrement à la ministre des Affaires étrangères du Rwanda, Louise Mushikiwabo, qui a trouvé gênant qu’un président qui est avec ses pairs, au sommet de la Francophonie ne vienne pas discuter avec eux, mais dicter ce qui devrait se passer dans leur pays.
Au micro de France 24, elle a qualifié cette attitude de très inélégante, avant de se poser la question de savoir, qui décide de l’avenir politique des Africains ? avant de trancher « ce n’est pas Paris qui décide, c’est évident ». Si elle reconnaît que le président français peut « exprimer son point de vue [et] donner des conseils à ses pairs, elle regrette le ton paternaliste et quasi directif. En plus, lorsqu’il dit « je suis venu à Dakar pour dire aux Africains », Mushikiwabo trouve que ce n’est pas normal ! « Nous sommes en 2014 ! », s’est-elle indignée. Dire une chose et son contraire
En Rd Congo, on n’est pas étonné de ce discours qui frise le discrédit des partenaires africains. Lorsqu’on jette un petit coup d’œil sur le XIVème sommet de la Francophonie organisée en 2012, on se rendra vite compte que tout avait été fait pour diaboliser le pays et ses autorités. Il aura fallu la détermination de ce peuple et de son chef pour que ces assises se tiennent à Kinshasa.
Pour revenir au Sénégal, disons que François Hollande dit une chose et son contraire à la fois. Parce que, donner des injonctions aujourd’hui aux Chefs d’Etat, c’est ressusciter la défunte Françafrique qui n’a pas été une bonne façon de se comporter devant des partenaires.
D’autant plus que la « Françafrique » c’est une politique néocoloniale de la France en Afrique fondée sur l’ensemble des relations, réseaux d’influence et des mécanismes politiques, économiques et militaires qui lient la France à ses anciennes colonies en Afrique, ainsi qu’à quelques autres pays africains. Cette politique dépassée est révolue et il appartient aux pays africains eux-mêmes de définir leur propre développement.
Désormais, comme l’ont dit nos héros nationaux, le développement ne viendra plus de l’Occident, ni de l’Orient. Mais il sera le fait des fils et filles de l’Afrique eux-mêmes. De même en ce qui concerne les réformes épinglées par François Hollande, ce sont les Africains eux-mêmes qui pourront décider de leur bien fondé ou pas. Ceci pour dire que la leçon donnée par Hollande est passée comme l’eau sur le corps d’un canard.
Le chantier de la réforme constitutionnelle va se poursuivre dans tous les pays concernés, parce que c’est la population africaine elle-même qui aura un mot à dire et non les Français.
François Hollande ferait mieux de s’intéresser d’abord à se faire aimer par ses compatriotes français dont la majorité lui tourne le dos, le niveau des opinions qui lui sont encore favorables dans les sondages le prouve, en lieu et place de venir distraire la jeunesse africaine qui n’a pas que ça comme problème. Sinon, si c’est lui qui doit dire aux présidents la façon dont ils doivent gérer leurs propres pays, à quoi servent-ils ?
Via L’Avenir