Tout est au rouge pour le gouvernement congolais : les principaux indicateurs économiques virent au vinaigre, l’insécurité prend de l’ampleur insoupçonnée, les difficultés sociales prédisposent la population à embrasser le diable. Etc. le pays ne saurait sortir la tête de l’eau avant plusieurs années, même si les cours de certains minerais amorce une courbe ascendante. Devant l’évidence, Kinshasa est réduit à courber l’échine, en dépit du discours triomphaliste tenu sur les toits.
On s’en doute bien, c’est auprès des capitales occidentales que le gouvernement tend la main pour obtenir un soutien financier, comme en assume la note d’information adressée aux chancelleries occidentales et dont RFI a consulté des extraits. Il est question pour Bruno Tshibala d’obtenir un matelas financier lui permettant d’équilibrer sa balance des paiements ainsi que des appuis budgétaires. Il ne pouvait en être autrement lorsqu’on sait que 80% des recettes d’exportations du pays proviennent du secteur minier aujourd’hui fortement en déliquescence.
Comme on pouvait se l’imaginer, la communauté internationale saisit la balle au bond pour puiser dans sa gibecière de chantages, le rapport de force basculant en sa faveur. Premier acte, les chancelleries occidentales émettent des réserves quant à la sincérité de la démarche, soupçonnant un dysfonctionnement de l’appareil étatique congolais. « On ne sait pas si cela relève d’un double discours, d’une division des tâches au sein du gouvernement ou bien simplement d’un manque de coordination », confie un diplomate. Au fait, les Occidentaux voudraient d’abord se rassurer de la sincérité de Kinshasa dont des responsables se sont distingués ces derniers temps par des invectives contre la communauté internationale.
En réalité Kinshasa aurait baissé la garde devant l’ampleur de la crise durement ressentie par les plus démunis et donc la couche la plus fébrile de la population. Avec une décote de près de la moitié de sa valeur, le Franc congolais, monnaie de paiement des salaires, provoque des convulsions dans le chef des fonctionnaires, aujourd’hui les nerfs au vif, puisqu’obligés de s’acquitter du loyer en dollar américain.
Pour obtenir gain de cause, Kinshasa devra faire mieux, en clair le gouvernement congolais devra se rapprocher du diagnostic des Occidentaux qui voient dans la dérive actuelle, non seulement les réalités du marché international mais aussi, et surtout les conséquences de l’incertitude politique au faîte de laquelle trône le manque d’assurance pour l’organisation des élections en décembre 2017. Selon RFI les chancelleries occidentales ont une vision diamétralement opposée (à celle de Kinshasa) : pour elles, la crise est avant tout politique, et c’est l’incertitude quant à la tenue des élections qui a mené le pays dans l’impasse. Une vision partagée par les bailleurs de fonds. Le soutien sollicité et attendu est donc au prix de concessions énormes sur le plan politique, singulièrement sur l’épineuse question de l’application « intégrale des prescrits de l’Accord de la SaintSylvestre ».
L’alerte de Kinshasa est un signal fort traduisant la déliquescence des autorités congolaise et dont l’Union européenne et les Etats-Unis ne tarderont pas de capitaliser en représailles à l’arrogance de certains dirigeants peu enclins en l’observation de la prudence diplomatique dans le langage. Aujourd’hui la souveraineté tant rabâchée est clouée au pilori devant la sagesse « la main qui reçoit est toujours en bas ». De quelle force peuvent se prévaloir les « frères » africains – eux-mêmes en détresse – devant le drame économique congolais ? Maints dirigeants se sont laissés berner par ce soutien oratoire, avant de se rendre à l’évidence de composer plutôt avec le plus fort, car on est souvent seul devant son sort. Ce n’est peut-être pas assez tard, Kinshasa jouerait mieux en composant avec les faiseurs de Rois, d’autant que l’Etat ne dispose pas encore de béquilles fiables pouvant asseoir la souveraineté réelle du pays.