Que reste-t-il désormais de l’Opposition du fait de la remise en question, par elle-même, des revendications conditionnant sa participation aux échéances électorales ? Pas grand-chose ! Car le 21 avril 2015, l’Udps annonce publiquement sa participation à tous les scrutins, en commençant par les provinciales. L’Unc le fait discrètement le 27 avril en donnant mandat à ses fédéraux en provinces et à l’étranger de retirer les formulaires des candidatures auprès des antennes de la Ceni.
Le Mlc – qui vraisemblablement s’y apprête – signe ce 2 mai le code de bonne consulte. Petite curiosité : signe le même jour le même code une structure dénommée « Alternative Vital Kamerhe ». On ne serait pas étonné de constater des actions similaires au courant de la semaine du 4 au 11 mai 2015. Preuve, si besoin est, que l’Opposition a souvent tort de privilégier l’accessoire sur l’essentiel, parfois en mettant dans la rue sa base…
Vendredi 1er mai 2015. Rtvs. Le député Basile Olongo déplore l’initiative unilatérale de son collègue Franck Diongo de proposer à la Ceni une prorogation du délai de dépôt des candidatures aux provinciales. Il est d’avis que pareille initiative devrait engager toute l’Opposition.
Samedi 2 mai 2015. Siege de la Céni, à Kinshasa. Le site onusien Radiookapi.net relève, dans sa dépêche mise en ligne le 2 mai 2015 à 3:45 sous le titre Provinciales: prolongation de l’opération de dépôt des candidatures en RDC » : « Le vice-président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), André Pungwe l’a annoncé, dimanche 2 mai, aux partis politiques venus signer le code de bonne conduite, à Kinshasa. Il a assuré que la prolongation de cette opération n’aura aucune incidence majeure sur le chronogramme global de l’institution électorale ».
Que se passe-t-il dans l’Opposition qui, subitement, fait bouger ses propres lignes, c’est-à-dire ne plus s’en tenir à ses revendications devenues tellement nombreuses au point d’empêcher l’homme de la rue de tes circonscrire?
Il n’est pas exclu que les Opposants aient saisi le non-sens de miser continuellement sur des partenaires extérieurs ayant leur propre agenda, s’agissant du calendrier électoral. En effet, premiers à réclamer de la Céni la publication d’un calendrier électoral global ces derniers ont décidé de ne financer que les législatives et la présidentielle de 2016.Et même à ce propos, premier choc: Washington — qui avait promis 30 millions de dollars comme contribution à la présidentielle (le secrétaire d’Etat John Kerry l’avait déclaré le 4 juin 2014 à Kinshasa) — ne va s’engager que pour 20 millions! Quant à l’Union européenne, elle attend le moment opportun pour le faire. Peut-être en 2016.
Entre-temps, il y a 2015 avec ses grands enjeux électoraux.
Il est donc possible que les Opposants l’aient compris: la « communauté internationale » ne se sent pas concernée par les provinciales (quand bien même elle avait participé à celles de 2006 ayant donné lieu aux sénatoriales et à l’élection des gouverneurs de province), surtout pas par les échéances locales, municipales et urbaines. C’est comme si les partenaires extérieurs n’ont besoin que du Président de la République et des Députés nationaux avec lesquels us négocient de la marche (ne lisez pas marches) du Congo. Autant dire une démocratie à deux niveaux. D’en haut et d’en bas.
Bataille électorale rude
A l’Opposition, on a probablement fait vite d’appréhender le danger dune victoire à la présidentielle et aux législatives, mais d’une défaite aux sénatoriales, aux locales, aux municipales et aux urbaines, surtout dans la perspective de l’application de l’article 2 de la Constitution, à savoir l’installation des nouvelles provinces. C’est une nouvelle dynamique qui se crée dans la décentralisation.
Aussi, c’est irrationnel que de la voir se faire conseiller par des décideurs occidentaux, et parfois se laisser encourager par des journalistes des médias périphériques de ne pas participer aux élections aux Et d’alors que celles-ci sont la base même du pouvoir en Amérique du Nord et en Europe.
Dans une chronique parue le 2 mars 2015, sous le titre « Les grands politiciens congolais ignorent tout de la démocratie à la base! », démonstration est faite qu’en majorité, de grands hommes d’Etat aux Etats-Unis, au Canada et dans des pays de l’Union européenne commencent leur carrière politique par la base.
Or, de tout temps, l’Opposition congolaise développe le discours d’avoir avec elle la base, voire d’être la base. D’où, lors de la campagne électorale de 2011, le slogan du genre « Peuple d’abord ».
Résultat: la base a de plus en plus du mal à comprendre l’option de sa hiérarchie de faire postposer par la Ceni les scrutins qui l’intéressent directement pendant que la hiérarchie, elle, est prête à se servir. Bien plus, les combattants de la base s’interrogent sur leur propre avenir dans l’éventualité – à ne pas exclure – d’une victoire de la Majorité à la présidentielle et aux législatives de 2016, alternance politique ne rimant pas forcement à défaite de la famille politique de Kabila!
Aussi, es initiatives solitaires de l’Udps, de l’Unc et (bientôt) du Mlc de s’engager dans la course aux provinciales – ce qui laisse croire le prolongement de la course aux locales, aux municipales et aux urbaines – sont comme un rattrapage annonciateur d’une bataille électorale rude.
Morale : ceux des protagonistes qui pratiquent la politique de la chaise vide sont par avance condamnés à s’en prendre à eux-mêmes. Qu’on le déteste ou qu’on l’aime, l’abbé Apollinaire Malu-Malu a prévenu tout le monde: « Le train des élections est déjà en marche… Le calendrier publié par la Commission Electorale Nationale Indépendante est exécutoire pour tout le monde ».
L’Opposition « œcuménique » est visiblement en train de le rattraper en courant. Et multiplie les risques de trébucher…