Le nouveau président de la République démocratique du Congo Félix Tshisekedi s’apprête à offrir des funérailles en grande pompe à son père, l’ex-Premier ministre et opposant Etienne Tshisekedi, décédé en Belgique le 1er février 2017.
A la croisée de son statut familial et politique, le chef de l’Etat congolais est au coeur de ce rendez-vous intime et public prévu sur trois jours, de l’arrivée du corps jeudi matin à Kinshasa jusqu’à l’inhumation samedi, avec un hommage populaire au stade des Martyrs vendredi.
Pendant plus de deux ans, la famille Tshisekedi n’a pas pu enterrer son patriarche décédé à 84 ans faute d’accord avec l’ancien régime du président Joseph Kabila sur les organisations des obsèques.
Investi le 24 janvier, acteur de fait avec Joseph Kabila d’une première transmission pacifique du pouvoir présidentiel au Congo, le président Tshisekedi se présente comme le continuateur de l’oeuvre de son père, qui avait défié la dictature du maréchal Mobutu en 1982.
C’est en tous cas le mot d’ordre officiel: « Ce ne sont pas des obsèques, mais la commémoration et la célébration de la victoire de la démocratie », selon le coordonnateur du Comité d’organisation, Lucien Lundula.
Pour l’occasion, M. Tshisekedi va recevoir six chefs d’Etat africains, dont son homologue du Rwanda Paul Kagame, un pas supplémentaire dans le réchauffement des relations entre les deux voisins.
Le programme prévoit deux moments de probable ferveur populaire
Jeudi toute la journée, le cortège funèbre doit aller de l’aéroport de Ndjili jusqu’à la morgue de l’hôpital du Cinquantenaire, soit une trentaine de km.
Le cortège va passer à mi-parcours à Limete à l’ancienne résidence du défunt, le siège et bastion du parti d’opposition qu’il a fondé en 1982 sous le régime du parti unique de Mobutu, l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS).
Vendredi, le corps doit être exposé au stade des Martyrs (80.000 personnes) pour un recueillement populaire, une messe et une veillée mortuaire « en présence de la famille présidentielle », « jusqu’à l’aube ».
« Ces obsèques sont un test pour Félix Tshisekedi », estime Emmanuel Kabongo, professeur de Sciences politiques à l’Université pédagogique nationale (UPN).
« Le challenge consiste à voir comment le peuple va honorer son icône, et comment le transfert de la popularité et de la complicité va se faire du père au fils après les obsèques », ajoute-t-il.
M. Tshisekedi va de fait mesurer la popularité de son nom au moment où il doit encore constituer un gouvernement en coalition avec son prédécesseur Joseph Kabila, qui a gardé tous les autres leviers du pouvoir.
Les partisans de M. Kabila devraient d’ailleurs être majoritaires dans le gouvernement que M. Tshisekedi doit encore constituer.
Une polémique sur le coût des funérailles a été lancée par les habituels trublions du mouvement citoyen Lutte pour le changement (Lucha).
« Honorer Étienne Tshisekedi en gaspillant l’argent public, c’est renier sa devise : le Peuple d’Abord », a regretté Lucha, qui cite le porte-parole du comité d’organisation: « le coût de ces obsèques est dans la fourchette de deux à six millions de dollars ».
« Pour le moment le financement dont on dispose n’émane pas du Trésor public. A certains égards on fera avec les moyens à notre disposition », affirme à l’AFP Moss Lenga.
Né en 1932, Etienne Tshisekedi a été ministre de l’Intérieur du dictateur Mobutu avant de passer à l’opposition. Alors qu’il était au gouvernement, le 1er juin 1966, quatre responsables politiques ont été pendus à Kinshasa, accusé de préparer un complot.
Le stade des Martyrs, où les cérémonies doivent être organisées, a été nommé en hommage à leur mémoire.
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