Même s’il s’est exprimé face à la presse pour la première fois en six ans, le président Joseph Kabila n’a pas tellement dévoilé ses intentions à l’approche, dans un climat de tension, des élections prévues le 23 décembre 2018, après plusieurs reports. Les marches organisées par le comité laïc de coordination, une organisation proche de l’Église catholique, sont violemment réprimées, alors que les manifestants réclament, pour l’essentiel, le respect de la Constitution qui interdit à Joseph Kabila, hors mandat depuis décembre 2016, d’être candidat à sa propre succession. En visite à Paris, André-Alain Atundu, le porte-parole de la majorité présidentielle, s’est confié au Point Afrique.
Le Point Afrique : Pourquoi pensez-vous que les élections auront lieu le 23 décembre 2018, alors qu’elles sont sans cesse reportées depuis 2016 ?
André-Alain Atundu : Nous sommes en période électorale. Toutes les grandes formations politiques se préparent aux élections. Il y a la volonté de la classe politique et la détermination des acteurs qui interviennent : le gouvernement pour financer les élections ; la Commission électorale pour accomplir les actes qu’il faut, notamment l’inscription sur les listes électorales. Tout se passe normalement jusqu’ici. Sauf accident – c’est toujours dans l’ordre du possible –, en décembre, nous devrions pouvoir élire nos élus.
Le président Kabila, qui s’est exprimé vendredi devant la presse, après six ans de « mutisme médiatique », a dit que les élections coûtaient cher. Cette phrase est lourde de sous-entendus…
Les élections coûtent cher. Ce constat se trouve même dans l’accord du 31 décembre 2016. Une de ses dispositions demande aux autorités compétentes de trouver les moyens de moraliser et de rationaliser la vie politique pour diminuer le nombre de partis afin que les élections coûtent moins cher. La loi électorale a été promulguée. La situation économique est difficile : notre budget est modique. Seules la volonté et la détermination pallient cela. Jusqu’à présent, l’État dégage des fonds mensuellement pour que ces élections se tiennent. Malheureusement, les acteurs politiques ne sont pas tous de bonne foi. Il y a des résistances. Une partie de l’opposition radicalisée préconise une transition sans Kabila ; une autre préconise la prise du pouvoir par la violence de la rue. Malgré tout, nous avançons laborieusement, avec la conviction qu’à la date échue, les élections se tiendront.
Les élections de 2006 et 2011 se sont tenues dans les délais… Gouverner, c’est prévoir, mais rien n’a été prévu pour le financement des scrutins initialement prévus en 2016, auxquels Joseph Kabila ne peut pas être candidat…
En 2012, soit quelques mois après l’investiture du président Kabila, le pays a été envahi et déstabilisé par un mouvement rebelle dénommé M23 qui a détruit les infrastructures économiques dans le Nord-Kivu et pollué la préparation des élections en emportant, notamment en Ouganda, les kits électoraux et en fabriquant des cartes d’électeur. La guerre a duré une année. Ses conséquences ont eu un impact sur le financement des élections. L’Assemblée nationale a demandé au président de la République de tout mettre en œuvre pour mettre fin à l’aventure du M23 en vue d’organiser les élections.