Il en était jusqu’ici le numéro deux, le voilà désormais à la tête de l’ANR. Izun Kakiak a été nommé patron de l’Agence nationale de renseignements, aussi puissante que redoutée, en République démocratique du Congo. Il succède à Kalev Mutond, un très proche de l’ancien président Joseph Kabila.
Ce matin au quartier général de l’ANR, le personnel était plutôt content du fait que c’est un enfant de la maison qui a été promu à ce poste. Izun Kakiak est un ancien. Il a rejoint les services de renseignements au début des années 1980. Originaire d’Idiofa, dans la province du Kwilu, il a étudié à l’Université de Lubumbashi.
C’est un homme effacé, un agent plutôt discret. D’abord intégré au département de sécurité intérieure, il a gravi tous les échelons : chef de bureau, chef de division, directeur adjoint, puis directeur avant d’être nommé chef du département de sécurité extérieure. Le tout dernier poste qu’il a occupé, c’est celui d’administrateur général adjoint de l’ANR.
Humaniser
C’est donc lui qui aura la charge d’humaniser les services de renseignements, suivant la promesse faite par le nouveau chef de l’Etat, Félix Tshisekedi. Car depuis qu’il est aux affaires, il revient régulièrement sur le thème du respect des droits de l’homme. Pointée du doigt par les organisations de défense et de promotion des droits de l’homme, l’Agence nationale de renseignements (l’ANR) est particulièrement citée par le président.
En janvier dernier, alors qu’il dirigeait sa première réunion du Conseil supérieur de la défense, Félix Tshisekedi en avait profité pour donner sa vision de cette agence. Il veut « humaniser les services de renseignements », de manière, disait-il, à redorer l’image même du pays.
Et un mois plus tard, devant les ressortissants congolais vivant à Windhoek, en Namibie, Félix Tshisekedi avait été plus explicite. « On ne peut plus avoir les services des renseignements qui soient une police politique ».
Aujourd’hui, certains détenus de l’ANR, surtout ceux en lien avec les manifestations politiques, ont été libérés et d’autres remis entre les mains de la justice. Et dans l’entourage du chef de l’Etat, on affirme que c’est l’un des points sur lesquels Félix Tshisekedi veut marquer la rupture avec le précédent régime.
Des réserves au sein de la société civile
Malgré une opinion plutôt favorable dont il jouit auprès du personnel de l’agence, certains activistes des droits de l’homme se disent inquiets et attendent de le voir à l’œuvre avant de le juger. Il est soupçonné par certains d’avoir, d’une manière ou d’une autre, participé aux prises de décisions ayant conduit aux violations des droits de l’homme intervenues sous le mandat de Kalev Mutond, son prédécesseur.
Raison pour laquelle Carbone Beni, l’un des responsables du mouvement citoyen Filimbi, même si ce dernier émet également quelques réserves quant à son arrivée à la tête de l’agence. « Le remplacement de Kalev Mutond est une bonne nouvelle pour l’opinion et pour nous la société civile, parce que sa personne a terni l’image de cette institution de haut niveau. Mais monsieur Kakiak était son adjoint », rappelle-t-il.
« Il fallait absolument avoir de nouvelles figures, de nouvelles personnes, qui ne sont pas entachées par des faits de violations des droits de l’homme caractérisés dans notre pays, estime Carbone Beni. Je crois qu’il y a une inquiétude à ce niveau, mais ça ne veut pas dire que la personne récemment nommée va se comporter de la même manière que monsieur Kalev. Mais je crois qu’il fallait faire mieux. »