Les États-Unis ont confirmé cette fin de semaine, les sanctions prises contre les responsables de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), le président Corneille Nangaa, le vice-président Norbert Basengezi et son fils Marcellin, conseiller de l’institution. Le Trésor américain parle de surfacturation de l’ordre de 100 millions de dollars lors de la passation de contrat entre l’État congolais et la société sud-coréenne Miru System pur l’achat des “machines à voter”.
Après deux jours de silence sur ce dossier, Corneille Nangaa est sorti de sa réserve pour assurer qu’il n’avait rien à se reprocher et expliquer que la décision de signer le contrat avec Miru system avait été prise en concertation avec l’Assemblée nationale. Il balaie ainsi l’appel du pied de l’association congolaise d’accès à la justice (Acaj) qui demandait aux trois hommes de démissionner.
Corneille Nangaa, le maître d’œuvre des scrutins qui ont débouché sur l’annonce de la victoire de Félix Tshisekedi à la présidentielle et sa défaite totale aux législatives nationale et provinciale, joue donc la sourde oreille. Une surdité qu’il applique aussi à la “décision” prise par Félix Tshisekedi après une réunion interinstitutionnelle – à laquelle les deux hommes participaient de suspendre sine die l’élection des gouverneurs suite aux soupçons de corruption qui planent sur le vote des élus provinciaux lors des élections indirectes des sénateurs.
Scrutin le 10 avril
Lors de ce scrutin, le FCC, la plateforme politique de l’ancien président Joseph Kabila avait raflé 90 des 100 sièges mis en jeu alors que l’UDPS de Félix Tshisekedi ne décrochait aucun siège malgré, notamment, ses douze élus dans la province de Kinshasa, qui devaient lui garantir au moins trois sénateurs… si ces élus votaient pour un candidat de leur formation.
Samedi, comme un nouveau pied de nez aux sanctions américaines et à la “décision” de report (non conforme à la Constitution) de Félix Tshisekedi, Nangaa a annoncé que l’élection des gouverneurs se déroulerait le 10 avril.
Une annonce gui n’a pas suscité de réaction du clan présentiel qui se voit pourtant contredit par le patron de la Ceni. Un silence d’autant plus assourdissant, après la confirmation des sanctions américaines, que Félix Tshisekedi a fait de la lutte contre la corruption son leitmotiv.
La société civile congolaise, elle s’interroge sur le maintien à la tête de la Ceni d’un homme accusé de corruption par Washington et critiqué sur la scène internationale pour l’organisation des élections congolaises du 30 décembre pour lesquels il n’a toujours pas publié le moindre PV démontrant l’exactitude de ses conclusions chiffrées. Le même trio mis en accusation doit encore organiser les scrutins reportés en décembre à Yumbi, Beni et Butembo. “Quel crédit accordé à ces gens pour ces prochains scrutins ?”, explique un des cadres de la société civile de Butembo.
Les cris du stade des Martyrs
Ce dimanche, Félix Tshisekedi et son directeur de cabinet Vital Kamerhe étaient présents au stade des Martyrs pour le match décisif pour la qualification des Léopards pour la prochaine Coupe d’Afrique des Nations. La victoire était impérative. Les joueurs du coach Florent Ibenge ont rempli leur mission en s’imposant 1-0 contre le Liberia. ils sont donc qualifiés pour la CAN qui se déroulera en Egypte.
Mais le fait le plus marquant de jour aura été, une fois de plus à l’occasion d’un match de foot, la communion de tout un stade pour réclamer l’arrestation de Kabila par son sucesseur. Un message que ne peut pas ne pas avoir entendu Félix Tshisekedi… De plus en plus mis sous pression par sa base et la population qui entendent qu’il impose sa griffe et se distance de la férule d’un Kabila dont l’ombre plane toujours sur toutes les arcanes du pouvoir congolais.
Lamuka survit
A la veille de ce match, Martin Fayulu, le candidat de la plateforme Lamuka, donné vainqueur de la présidentielle par différents canaux, dont celui des évêques congolais, retrouvait les autres fondateurs de ce mouvement à Bruxelles. Une réunion qui a duré trois jours et qui a débouché sur l’annonce que Lamuka allait tout faire pour se muer en plateforme politique. Les cinq leaders ont semble-t-il rencontré des difficultés à s’entendre sur le texte final. Bemba, Katumbi, Matungulu, Muzito et Fayulu réaffirment que les résultats des élections annoncés par la Ceni “ne correspondent pas à la vérité des urnes”, pointent un doigt accusateur vers Kabila et la Ceni mais sans un mot pour l’actuel président et sans rappeler leur détermination à obtenir la vérité des urnes. Une inflexion difficile à vivre par certains.