La coalition pour la gestion commune de la Res publica conclue entre le Front commun pour le Congo (FCC) et le Cap pour le changement (Cach) évolue tant bien que mal nonobstant les derniers soubresauts ayant failli emporter la digue. Une coalition qui ne tient plus que par la volonté de deux hommes, Félix Tshisekedi et Joseph Kabila, jusqu’à ce jour partenaires dans une coalition qui contient curieusement les ingrédients d’une cohabitation qui ne dit pas son nom.
Malgré moult incidents de parcours créés par leurs regroupements politiques respectifs, ces deux leaders maintiennent néanmoins le cap en soufflant le chaud et le froid dans un deal qui ne leur offre pas suffisamment de possibilité d’affranchissement. Au-delà des apparences qu’ils veulent sauver, la coalition souffre dans son évolution à cause de l’hypocrisie et du manque de franchise du FCC qui ne cesse de tirer la couverture de son côté au mépris des principes censés guider une coalition. Avec une majorité confortable à la chambre basse du Parlement, en plus d’avoir dans son giron les provinces, le FCC vient de rééditer l’exploit au Sénat en plaçant au perchoir de l’institution, Alexis Thambwe Mwamba, réputé incarner la ligne pure et dure de la « Kabilie ».
Cette frénésie boulimique du FCC procède d’un plan savamment monté par ses stratèges, à en croire des indiscrétions. Vis-à-vis d’un chef de l’État qui ne lui rassure guère et dont les propos de déboulonnage du « système Kabila » est pris très au sérieux par ceux à qui ils sont destinés, le FCC veut s’aménager, d’ores et déjà, un espace de sécurisation pour se mettre à l’abri d’un éventuel tsunami. Ainsi, le Parlement se présente comme le meilleur endroit pour contrer, à tout moment, le dessein nourri par Félix Tshisekedi. D’où sa mainmise sur les deux chambres du Parlement, quitte à riposter éventuellement en brandissant le spectre des poursuites et de mise en accusation du chef de l’État conformément à l’article 165 de la Constitution, soutiennent nombre d’analystes.
Un projet qui, au terme de la loi fondamentale, ne peut se matérialiser que si la décision requiert la majorité de deux tiers des membres du Parlement composant le congrès (art.166). Une manière pour le FCC de riposter à l’épouvantail de la dissolution par le chef de l’État de l’Assemblée nationale (art.148) que ne cesse de brandir ses partisans. Du berger à la bergère, dirait-on. Il y a également anguille sous roche, à considérer l’obstination du FCC à avoir dans son escarcelle le ministère de la Justice, comme pour dire que tout se tient. Entre-temps, les hommes de Joseph Kabila sont pressentis, dans le prochain gouvernement, aux commandes des postes-clés de l’appareil sécuritaire, judiciaire et économique du pays, avec une mainmise importante sur les intérêts miniers congolais, à en croire des indiscrétions. Comme quoi, la méfiance ressentie de part et d’autre continue à réguler cette association de circonstance qui n’a de coalition que de nom.
Pérenniser la « Kabilie »
À la fin, ce qui importe pour le FCC, c’est de pérenniser le « système Kabila » en garantissant son hégémonie sur la scène politique. En réalité, tout est mis en place pour tenir en respect le chef de l’État que l’on veut réduire à sa plus simple expression, révèlent des informations de coulisse. En somme, avancent certains analystes, la « Kabilie » veut s’offrir la possibilité de peser sur la donne politique avec les deux chambres législatives aux ordres qui pourraient, si nécessaire, modifier les lois et permettre un éventuel retour aux affaires de l’ex-président devenu sénateur à vie. Très minoritaire en sièges au Sénat et à l’Assemblée nationale, le Cach assiste impuissant à la mise en place de ce projet funeste.
Face à l‘évidence, et en lieu et place d’une résignation suicidaire, le regroupement politique de Félix Tshisekedi devrait lorgner à présent vers ce que les praticiens du droit qualifient de « majorité de fait », celle qui siège dans l’hémicycle et qui est à la fois dynamique et mouvante, car elle est soumise de manière permanente aux pressions externes et internes du Parlement. C’est cette majorité parlementaire migratoire composée des députés indépendants d’esprit, pense-t-on, qui va certainement constituer un soutien indéniable aux différents projets du président de la République, Félix Tshisekedi.