SIDA : Des premiers espoirs de Guérison

Depuis le lancement, début février 2013 à Marseille, des tests sur l’homme d’un vaccin thérapeutique contre le Sida, les Dr Erwann Loret et Isabelle Ravaux se sont astreints au silence. Le biologiste et le médecin entendaient poursuivre ce protocole à l’abri des polémiques et des extrapolations. Tant que les résultats de cette étude ne sont pas officiellement publiés, les chercheurs et les organismes scientifiques engagés dans ces recherches se refusent donc à toute communication.

Pourtant, d’après nos informations, ce sont des conclusions très encourageantes qui vont très prochainement être révélées. De bonne source, on apprend en effet que neuf patients infectés par le VIH et traités par le candidat vaccin auraient atteint la première étape vers la guérison du Sida. Autrement dit, la présence de cellules infectées dans leur sang est devenue totalement indétectable.

Ce qui est une première à l’exception du cas unique du « patient de Berlin » (lire ci-contre). Ces neuf personnes ont fait partie de l’essai clinique entrepris en 2013, pour tester le vaccin thérapeutique « marseillais ». Objectif : démontrer le rôle d’une protéine, appelée TAT, dans la protection et l’activation des cellules infectées par le VIH, grâce à un vaccin, appelé Tat OYI.

Chez 9 patients, la présence de cellules infectées est devenue indétectable

Autorisé par l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament (ANSM), financé par la société marseillaise Biosantech, cet essai clinique s’est déroulé au Centre d’Investigation Clinique de l’hôpital de la Conception (APHM), piloté par le Dr Isabelle Ravaux. Il est l’aboutissement des travaux menés depuis des années,contre vents et marées, par le Dr Erwann Loret.

Le vaccin thérapeutique mis au point par le biologiste a été testé sur quarante-six volontaires infectés par le VIH depuis plus d’une dizaine d’années et sous trithérapie. Le protocole, d’une durée de douze mois, a consisté en trois injections, à des doses différentes, réalisées sur quatre groupes de patients (dont un placebo). Puis, la trithérapie des volontaires a été interrompue pendant deux mois avec un suivi clinique et biologique. Objectif : vérifier que trois mois après la fin du traitement, le virus a été contrôlé dans l’organisme et ne resurgira pas de plus belle, sous la forme d’un « rebond viral ».

Neuf patients (issus de deux groupes) ont très bien répondu à ce vaccin puisque toute trace de cellules infectées a disparu de leur sang. Le traitement a également empêché l’augmentation des cellules infectées dans les cellules sanguines, après arrêt de la trithérapie. Il a ainsi été clairement établi une corrélation entre la présence des anticorps anti-Tat et le contrôle du rebond virémique. Associés à la trithérapie, ces anticorps ont la capacité d’entraîner la disparition accélérée et constante des cellules infectées dans le sang. Sans vaccin, cette disparition nécessiterait au moins soixante-dix ans de trithérapie, lourde d’effets secondaires.

Depuis trente ans, il y a eu environ deux cents essais de vaccins contre le Sida. Seulement vingt-et-un ont tenté l’interruption de traitement, sans succès jusqu’à aujourd’hui. Les résultats obtenus à Marseille montrent que l’espoir d’un traitement curatif est possible, même s’il est probable qu’il nécessite plusieurs années afin de permettre l’élimination des cellules infectées dans l’ensemble des tissus.

Ces conclusions seront publiées ces jours-ci dans la très réputée revue scientifique américaine Retrovirology. Les neuf patients qui ont répondu au traitement ont été remis sous trithérapie, ainsi que l’exigeait le protocole. Leur suivi se poursuit. Pour trois d’entre eux, il est déjà établi que les cellules infectées restent indétectables dans leur sang deux ans après l’arrêt du traitement.

Libérer les cellules tueuses !

Les trithérapies, traitement actuel du Sida, bloquent le développement du virus, mais ne permettent pas une guérison véritable. À l’arrêt du traitement, le VIH redevient destructeur. Les trithérapies entraînent en outre de lourds effets secondaires (maux de tête, vomissements, fatigue, perte de poids, accès de fièvre, diarrhées et problèmes de peau, lipodystrophie). Le vaccin expérimenté à Marseille a une visée thérapeutique. Il cible la protéine TAT du virus VIH, qui entrave le fonctionnement normal des cellules « tueuses » du système immunitaire, les empêchant d’éliminer les cellules infectées. Ce vaccin a été le premier protocole clinique au monde à être testé en phase II chez l’homme, afin de déterminer quelle dose sera la plus efficace. Selon les résultats, la poursuite des recherches devait être orientée vers un traitement court et définitif ou de long terme, en complément ou en remplacement de la trithérapie. À ce stade, de nouveaux tests sont envisagés dans le cadre d’une étude multicentrique associant plusieurs centres eu Europe et aux Etats-Unis. À noter que les recherches menées à Marseille se distinguent par leur mode de financement. Biosantech est une petite société créée en 2011 sur fonds propres, par Corinne Treger et son mari, décédé depuis. Kinésithérapeute, Corinne Treger n’est pas issue du monde de la recherche médicale, ni son défunt mari. « Au départ on nous a pris pour des fous, des illuminés », expliquait-elle récemment. Biosantech a également recueilli des fonds par financement participatif sur internet (crowdfunding).

Un vaccin déjà efficace sur l’animal

Étudié par plusieurs équipes dans le monde, le principe actif ciblant la protéine TAT du VIH a déjà été testé avec succès sur la souris et sur le lapin. En 2001, l’équipe du Dr Loret a entrepris des essais sur le macaque: sept singes, volontairement infectés par le SHIV (un virus hybride entre le VIH et le SIH, le sida du singe) ont reçu une injection. Résultat : « Après 56 jours, on ne décelait plus de cellules infectieuses chez les sept macaques », expliquait alors le Dr Loret. Aucune toxicité n’a été observée. En 2006, ce même vaccin a de nouveau été testé à Harvard, dans le cadre d’une étude américaine sur le macaque. L’injection était un mélange de 15 principes actifs. Tous les singes ont vu leur virémie diminuer. Mais aucun des autres principes actifs n’a donné de résultat lorsqu’il était utilisé séparément.

La piste marseillaise semble donc la plus prometteuse. D’autant que le vaccin du Dr Loret innove aussi en matière de fabrication. Contrairement à d’autres vaccins décriés pour leur toxicité, le sérum marseillais ne comporte pas d’adjuvant à base d’aluminium. Ce composant, utilisé depuis Pasteur, amplifie la réaction immunitaire, avec l’inconvénient de parfois dérégler la machine.

À ce jour, dans le monde, une quarantaine de vaccins sont en cours d’essai chez l’homme. La plupart sont préventifs (protection des personnes non infectées). Très peu de protocoles portent sur des vaccins thérapeutiques (traitement des personnes déjà infectées par le VIH).

Via La Provence